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périodiques.Journal of speculative philosophy..

publiée précédemment dans la même Revue et analysée ici (janvier 1879, tome vii, p. 102).

L’auteur débute par quelques mots de critique à l’égard de M. Cabot, puis il énonce la thèse que son article est consacré tout entier à établir : « La qualité d’étendue ou le quale spatial, comme je l’appelle, existe originellement sous une forme simple et uniforme. Les positions qui plus tard sont déterminées, par rapport les unes aux autres, sont un résultat de l’expérience guidée par l’attention. » L’auteur, on le voit, soutient la thèse nativiste. D’après lui, les divergences d’opinions viennent de ce que l’on n’a pas distingué entre la pure qualité sensible de l’étendue, les subdivisions et la mesure de l’étendue. Il est certain que connaître l’étendue, c’est saisir un système de rapports entre une multitude de parties, en un mot accomplir une synthèse mentale ; mais à l’origine il n’y a rien de pareil ; il n’y a « qu’une conscience vague de l’espace, sans positions ni directions distinctes » ; c’est « une simple forme de la sensibilité rétinienne ou cutanée qui n’implique aucun élément musculaire, quel qu’il soit i. — Il est étrange qu’on se plaise à répéter que l’espace n’est que l’ordre des coexistences. « Le bruit du ruisseau près duquel j’écris, l’odeur des cèdres, le sentiment de bien-être que me cause mon déjeuner et l’intérêt que me cause mon article coexistent dans ma conscience, sans me donner pour cela aucune idée d’espace, » Pour que l’ordre des coexistences devienne un ordre dans l’espace, il faut : 1° qu’il y ait entre les éléments une gradation continue ; 2° que cette gradation soit enveloppée dans l’unité d’une sensation spéciale d’espace. — L’espace est une sensation (feeling) si particulière qu elle n’est descriptible qu’en termes d’elle-même. Pourquoi donc hésiter à l’appeler un élément de la sensation à nous donné par la rétine ou la peau qui perçoit les intuitions ? Car l’intuition d’un espace objectif donné, avec son quale particulier, ne doit pas être confondue avec la notion de l’espace total. La première est une sensation donnée tout d’un coup. La seconde est une construction réelle. Si l’espace résultait, comme le veulent les empiriques, de la fusion d’un grand nombre de positions perçues, on ne voit pas comment il pourrait perdre ce caractère de saccade et d’égrènement qui se rencontre dans certains cas. Si, en effet, je pense à l’espace entre moi et le mur, il m apparaît comme parfaitement uni ; mais je ne puis me représenter l’espace entre New-York et San-Francisco que comme un nombre successif de journées en chemin de fer avec une multitude d’arrêts, dont aucun ne peut être omis sans fausser mon image de cet espace. Or, si la conscience de l’espace était composée d’idées innombrables de mouvement et de position, l’espace le plus court devrait nous présenter ce caractère d’égrènement.

Après quelques remarques curieuses, l’auteur s’efforce d’établir la thèse, déjà soutenue par Stumpf, que la rétine a l’intuition des trois dimensions de l’espace. Il s’appuie sur les perceptions auditives. Certaines personnes, les aveugles en particulier, peuvent, grâce à l’excès-