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analyses.spir. Denken und Wirklichkeit.

M. Spir, une loi primordiale, une disposition intérieure qui force à penser d’une certaine manière. Ainsi notre connaissance des corps contient un élément qui ne peut être déduit d’aucune expérience, à savoir la notion de l’absolu. S’il y a une proposition qui se comprenne d’elle-même, qui soit immédiatement certaine, c’est bien le principe d’identité, et cependant les données de l’expérience n’en offrent pas la vérification. Il n’y a en réalité qu’une proposition a priori, et elle doit être à la fois synthétique et analytique ; or tels sont bien les caractères du principe d’identité, analytique lorsque nous le considérons en lui-même et synthétique dès que nous l’appliquons aux données de l’expérience ; car il est à la fois le fondement de notre connaissance de la substance absolue et d’autre part celui de la connaissance que nous avons de la succession ; c’est lui qui nous permet de distinguer la vérité de l’erreur et donne la raison de notre foi en la valeur de l’induction. Quant à la notion de causalité, pour prendre un exemple des dérivés de ce principe a priori, elle n’en est qu’une conséquence. La loi de causalité, suivant notre auteur, est la conclusion d’un syllogisme dont la notion a priori et, d’un autre côté, celle du successif fournissent les prémisses. Sans l’expérience, pas de synthèse ni de déduction. Kant avait bien compris que de simples déductions a priori n’aboutissent à aucune conclusion. Il l’expliquait en niant la valeur objective des notions a priori. Mais c’est uniquement parce que l’expérience vient donner une valeur synthétique au principe d’identité qu’il est si fécond en conséquences, et nous n’avons pas lieu d’infirmer la valeur objective de cette proposition, la seule qui soit vraiment a priori.

M. Spir examine ensuite diverses théories sur la causalité ; il reproche à Kant d’avoir fait de cette notion un simple rouage, sans aucune valeur objective, de la faculté de connaître ; il loue la force de l’argumentation de D. Hume et fait remarquer l’inconséquence des empiriques anglais, qui ne veulent pas abandonner l’induction, tout en refusant d’admettre la nécessité de la succession et de la coexistence des phénomènes. Quant aux empiriques allemands, i ils ont encore à cet endroit, dit-il, leur robe d’innocence. » On en peut juger par cette affirmation de Herbart : il nous faut accepter la liaison des phénomènes comme étant donnée, bien que nous ne puissions pas comprendre comment elle nous est donnée. Pour notre auteur, comme nous le savons déjà, la vérité se trouve entre l’hypothèse qui fait de cette notion un produit de l’expérience et celle qui en fait une conséquence de la nature de la pensée. Mais le raisonnement nous parait assez original pour mériter d’être reproduit : « On accordera, j’espère, dit-il, qu’identité avec soi-même et changement sont deux idées disparates. Changer c’est se mettre en désaccord avec soi-même. Le changement est la seule manière dont la non-identité d’une chose peut être mise en évidence. Le changement est donc étranger à l’essence même des choses. Or, du moment où le changement est étranger à l’essence inconditionnelle des choses, il faut, comme conséquence, que tout changement soit conditionnel ; c’est là précisément