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poursuivre une fin irréalisable, et, quand même cette fm se réaliserait, tout serait peut-être à recommercer !

Enfin, si les souffrances du monde ne sont qu’un moyen pour racheter l’Un-Tout d’une autre douleur, il faut que cette douleur soit plus grande que celle qu’il éprouve actuellement. Elle ne peut l’être par la durée puisque le temps n’a existé que du moment de la création ; elle l’est donc par l’intensité. Mais alors, comme après l’anéantissement général, il y a cent à parier contre cent que la souffrance infinie recommencera, il est dans l’intérêt de l’absolu, non pas d’abréger, mais de prolonger autant que possible l’état relativement tolérable qu’il traverse. Donc, bien loin d’être un acte de folie, la création du monde était un acte très-raisonnable, le désir de le créer parfaitement légitime, et la loi morale nous commande de travailler à la conservation de l’univers et non à sa ruine. Ce dernier argument est décisif. M. de Hartmann est vaincu par ses propres armes.

Arrêtons-nous maintenant, et jetons un coup d’œil autour de nous. Le système de morale de M. de Hartmann s’est présenté à nous comme un édifice compact et imposant dont on pouvait détacher une ou plusieurs pierres sans ébranler la solidité de l’ensemble. Nous avons reconnu que cette apparence était une illusion, et que toute la construction reposait sur trois piliers, les idées du devoir, de la liberté et de la fin ; dès que nous avons mis la main sur eux, ils se sont l’un après l’autre effondrés en poussière et ont entraîné dans leur chute l’édifice entier qu’ils soutenaient. À présent, de quelque côté que nous tournions nos regards, nous ne rencontrons plus que des débris informes et des tronçons mutilés ; il ne reste pas pierre sur pierre. Mais il n’est pas possible que dans un pareil monument, élevé avec tant de peine, pour lequel on a rassemblé des matériaux de partout, il ne se trouve pas quelque fragment de prix, quelque ornement ciselé, qui vaille la peine d’être recueilli et conservé. C’est la dernière partie de la tâche que nous avions à remplir et qui nous consolera, ainsi que le lecteur, de l’aridité de la première.

Théodore Reinach.
(A suivre.)


    que le monde a pu sortir déjà fois de la volonté, en conclut que la vraisemblances d’une nouvelle création est de Mais : 1° rien ne prouve que nous n’en soyons pas à la première expérience ; 2° la formule est une inconcevable erreur de mathématiques.