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ments simples de la vie intellectuelle, qui ne sont autres à son avis que les représentations, comme autant de forces contraintes par l’unité de la conscience d’agir mutuellement les unes sur les autres. Ceci lui a suggéré l’idée d’une statique et d’une dynamique de l’âme, dont les lois se laisseraient formuler mathématiquement. Zimmermann a constaté, dans l’intérêt de l’exactitude historique, que la pensée d’appliquer la mathématique à la psychologie s’est éveillée de très-bonne heure dans l’esprit de Herbart, — probablement même avant l’année 1800 ; mais il n’en est pas moins un fait avéré qu’il n’a trouvé la vérification véritable de ses formules psychologiques que dans la théorie de l’harmonie et que c’est alors qu’il s’est décidé à les exposer explicitement comme base d’une psychologie « nouvelle et meilleure »[1]. Herbart lui-même appelle la musique « une confirmation empirique de sa théorie construite à priori », et il ajoute « qu’elle est dans l’expérience un de ces points stables nécessaires à toute théorie de ce genre qui veut être vérifiée et ne pas passer pour une fiction comme tant d’autres »[2]. Ces paroles, tellement caractéristiques, citées par Zimmermann, prouvent non-seulement l’influence de cet art sur la psychologie de Herbart, mais elles répandent aussi une vive clarté sur sa manière de penser en général. — Combien ne se montre-t-il pas supérieur à ses contemporains, qui posaient des théories sans se soucier de la réalité, ou qui ne s’en occupaient que pour l’assujettir à leurs propres idées ! Et comme il s’élève aussi au-dessus de cet empirisme irréfléchi qui s’empara des esprits après la chute de la philosophie transcendante, de cet empirisme qui rejetait avec dédain toute théorie et toute recherche déductive ! Herbart ne méprise pas le raisonnement à priori ; il voit au contraire dans la méthode déductive un puissant moyen de progrès pour toutes les sciences ; mais une théorie qui n’eût pas été exactement ratifiée par l’expérience serait à ses yeux une fiction ; et jamais son esprit consciencieux ne se contentait d’une affirmation incomplète. Il faut, dit-il, que l’expérience qui doit vérifier une théorie soit d’une exactitude égale à celle de la théorie même, car, si l’expérience est équivoque ou chancelante, peut-elle fournir le moyen d’affermir une théorie qui a été, il est vrai, formulée à priori, mais avec exactitude et précision[3] ?

Ceci nous enseigne déjà quels ont été les services rendus à Herbart par la théorie de la musique. Ce qui constitue la base fonda-

  1. Ueber den Einfl. der Tonlehre, p. 5.
  2. Herbart’s psychologische Untersuchungen : Sammtl. W., vii, 193, chez Zimmermann ; Einfl. der Tonlehre, p. 6.
  3. Einfluss der Tonlehre, p. 6.