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de cet oubli ou de ce dédain, une rapide analyse des principaux ouvrages de Knutzen nous permettra de juger combien l’un et l’autre sont immérités.

La « Dissertatio metaphysica de œternitate mundi impossibili » est, comme l’essai antérieur « De concordia rationis cum fide », dominée par des préoccupations théologiques. Le problème dont elle s’occupe est du nombre de ceux où les disciples piétistes de Wolf se sentaient alarmés par les déclarations du maître. Wolf avait dans quelques-uns de ses écrits émis incidemment l’idée qu’aucun philosophe n’a réussi à prouver que le monde ne soit pas éternel ; et que, d’ailleurs, l’éternité successive du monde ne saurait se confondre avec l’éternité indivisible de l’être absolu et n’enlèverait rien à la perfection divine. Les théologiens hostiles à Wolf n’avaient pas manqué, comme Lange et Budde, d’accuser cette doctrine d’athéisme. En vain l’accusé invoquait pour se justifier le témoignage de saint Thomas d’Aquin ; en vain il adoucissait et atténuait l’expression de sa pensée : les piétistes ralliés à son système, comme Schultz, n’en persistaient pas moins à se séparer hautement de lui sur ce point. Knutzen se propose, à son tour, de combattre l’opinion de Wolf. Il ne se contente pas d’employer des arguments théologiques et d’insister sur les conséquences dangereuses pour la foi d’une semblable hypothèse. Sans renoncer à faire usage de considérations de ce genre, il développe avec complaisance des raisons plus philosophiques. Le monde ne peut être infini a parte ante, parce que l’idée d’une succession implique celle d’un premier terme ; le monde n’a pas davantage l’infinité a parte post, puisque le concert d’un nombre infini est une pure contradiction. Remarquons en passant que la forme syllogistique de la démonstration essayée par Knutzen, que les arguments eux-mêmes doijt il se sert rappellent la méthode et les preuves de la Cosmologia de Wolf. L’élève bat le maître avec les armes qu’il lui a empruntées. S’il ne le cite pas, c’est que l’interdiction pèse encore sur sa doctrine.

Nous devons rattacher à la même inspiration que le précédent le plus populaire des écrits de Knutzen, le « Philosophischer Beweis von der Wahrheit der christlichen Religion ». Le piétisme philosophique, que l’auteur avait puisé dans les leçons de Schultz, y poursuit avec résolution, et en toute liberté cette fois, l’alliance de la théologie et d’un wolfisme modéré. Il est curieux de voir les vérités de la religion établies à la manière des vérités mathématiques et présentées sous la forme de définitions, de théorèmes, de lemmes, etc. L’auteur s’attache à prouver que la nécessité d’une révélation s’im-