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nolen.les maîtres de kant

que le Christ et ses apôtres avaient étudié sous Wolf, à Halle. »

Schultz nourrissait assurément le dessein et l’espoir de faire du jeune Kant l’un des plus efficaces instruments de son œuvre religieuse. Il avait pu étudier et apprécier à loisir, dans le brillant élève du Collegium Fridericianum, l’union la plus rare des qualités morales et des dons de l’intelligence. Nul ne devait lui paraître plus propre à goûter et à démontrer aux autres cet accord de la philosophie wolfienne et de la théologie morale, qu’il croyait si favorable à la cause du piétisme. Les vœux de la famille de Kant étaient entièrement conformes aux siens. Il ne paraissait pas que la vocation du jeune homme ne s’accordât pas avec la conduite que lui traçaient son affection envers ses parents, sa reconnaissance envers son protecteur.

Il est certain que Kant, en arrivant à l’Université, se fit inscrire parmi les étudiants de la faculté de théologie ; mais obéissait-il en cela au désir bien arrêté de se livrer aux études théologiques et d’embrasser la carrière à laquelle elles préparent ? ou ne faisait-il que suivre l’usage, imposé à tous ceux qui ne se destinaient ni à la médecine ni au droit, de se rattacher à la faculté de théologie ? En d’autres termes, Kant est-il entré à l’Université avec l’intention de se préparer à la carrière théologique, et n’a-t-il renoncé que plus tard à cette première vocation, pour se consacrer à l’enseignement ? ou cette résistance aux désirs de sa famille et de Schultz était-elle déjà arrêtée dans son esprit avant qu’il quittât le collège ? Schubert et Kuno Fischer, dans leurs biographies de Kant, soutiennent la première opinion ; B. Erdmann fait valoir en faveur de la seconde des arguments qui ne paraissent pas sans force. En tout cas, il est hors de doute que les mathématiques, les sciences et la philosophie furent l’occupation préférée de Kant à l’Université.

Dans son programme de 1741, Schultz annonçait à l’Université « Collegium thetico-polemicum et morale, quo dogmata theologiæ revelatæ rite exposita ex S. Scripturæ oraculis vindicabit, ab objectionibus, quibus petuntur maxime recentioribus, tuta præstabit, illorumque consensum cum veritatibus rationis diligenter demonstrabit, ut hoc ipso auditoribus, quidquid in philosophicis profecerunt, eo magis in theologicis quoque utile reddatur, cuncta denique ad praxin, quo omnia tandem in theologia collineant, transferet. »

Mais les arguments philosophiques, que Schultz empruntait au wolfisme, ne surent pas rendre la théologie plus supportable au jeune étudiant, que la discipline du collège de Frédéric n’avait réussi à le gagner aux pratiques de la dévotion piétiste.

Il est vraisemblable que Schultz ne dut pas être peu affecté par la direction imprévue que prenaient l’esprit et les études de Kant.