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notices bibliographiques

philosophie auxquels il semble plus particulièrement destiné par son auteur.

E. B.

G. Trezza. Confessioni d’un scettico. Verona e Padova, Drucker e Tedeschi ; 1878. In-18, 151 pages.

L’ouvrage de M. Trezza est un recueil de vingt-sept lettres adressées à une dame.

L’auteur est sceptique, parce que « la réalité n’est qu’un groupe de relations sans aucune fin transcendante », parce que « les choses lui apparaissent au pied des cimes olympiques de la raison consciente d’elle-même », parce qu’il « voit l’ironie de l’être éternel se travestissant sous des formes caduques ».

D’après lui, « l’éternelle spontanéité des groupes mécaniques qui se résout dans l’éternelle nécessité des lois n’a pas besoin d’un Dieu qui la crée, d’une providence qui la gouverne. La providence de la nature appartient à elle-même ; sa finalité ne lui vient pas d’un démiurge extérieur aux causes, mais elle la porte dans ses lois, qui à travers les désastres immenses de l’accident retrouvent toujours leur voie tôt ou tard. Un Dieu transcendant supposerait l’absurde scientifique du surnaturel : l’infinité vivante n’a pas de dehors, et, si Dieu en est le symbole, alors il vit dans la nature même, exprimant ses parties les plus idéalement vraies ; alors chacun se fait son propre Dieu, le reflète comme une vision de l’esprit dans son cerveau, le transmettant comme le flambeau de la vie de monde en monde. »

« Ce n’est pas qu’on puisse dire pour autant, que l’univers marche taciturne et inconscient. Que sais-tu des idées de l’univers si tu les compares aux tiennes ? Que sais-tu de la pensée si tu la circonscris seulement à la conscience ? Parce que la nature ne raisonne pas à ta manière, te paraît-elle muette ? Parce qu’elle ne satisfait pas les tendances romantiques de ta foi, crois-tu qu’elle ne contient en elle-même aucun idéal ? Les lois de l’univers sont sceptiques en ce qu’elles sont l’effet d’immenses expériences mécaniques dans le temps et dans l’espace, non d’un Dieu qui les crée hors du temps, accouplant selon son bon plaisir les groupes des atomes… Si un philosophe grec disait que tout est plein de dieux, en tant que tout s’alimente et se féconde par eux et en eux, nous reconnaissons que tout est plein de Dieu, parce que Dieu est le tout, Dieu est la vie, la pensée, le sentiment de tout ; chacun de nous le porte en lui-même. »

Le scepticisme rationaliste de M. Trezza déracine-t-il impitoyablement toutes nos illusions ? La sagesse de l’auteur est indulgente pour le « songe ineffable de l’amour ». Des exclamations et des épithètes passionnées rompent la monotonie tour à tour plaintive et frondeuse de ses confessions.

C. H.