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opportunité. Les analyses nouvelles qu’il introduit, les discussions sérieuses auxquelles il se livre, la critique des doctrines régnantes qu’il soumet à l’examen et qui, selon lui, malgré leur prétention à la science positive, n’en affectent pas moins une allure dogmatique, tout cela est tout à fait propre à appeler l’attention des esprits sérieux sur ce livre et offre au lecteur impartial un solide et réel intérêt. On y trouvera peut-être un peu de confusion et de désordre sous un ordre apparent, trop de digressions, de la longueur dans les discussions. La critique partout mêlée à l’exposition, les problèmes de physiologie, de psychologie alternant avec ceux de la logique et de la métaphysique, nuisent à l’unité et à la clarté totales. Les logiciens purs ne manqueront pas de se récrier ; mais l’ouvrage dans son ensemble et dans chacune de ses parties n’en est pas moins capable de soutenir avec avantage l’examen d’une critique sérieuse, à laquelle nous regrettons de ne pouvoir nous livrer. Il faudrait un très-long article pour apprécier le contenu de cette logique, ses principes, sa méthode et ses résultats.

Nous nous bornons à insister sur la pensée fondamentale à laquelle nous donnons notre adhésion. Nous nous associons aux reproches que l’auteur adresse à ceux qui négligent de remonter aux idées premières dans les débats de la philosophie contemporaine.

Pour bien raisonner, dit-on, la clarté des idées est avant tout nécessaire. On a parfaitement raison. Mais comment arriver à cette clarté, si l’on ne remonte aux premiers éléments de la pensée ? Comment, dans les cas particuliers surtout, avoir des notions précises si l’on s’interdit de pénétrer jusqu’à ces éléments premiers, de les vérifier et de les contrôler ? Or c’est là, dit très-bien l’auteur, ce qui accuse l’esprit superficiel de notre époque. On prise beaucoup Kant, on répète à satiété des phrases toutes faites, comme celles-ci : « Il faut revenir à Kant et à sa méthode, etc. » On vante les résultats principaux de sa critique, dont le plus clair est que toute connaissance se réduit à l’expérience. Mais on se garde bien d’examiner et d’approfondir les bases de sa doctrine. Une pareille entreprise serait trop pénible et trop difficile. Or que sont toutes ces idées de réalité, de subjectivité, d’objectivité, d’être ou de chose en soi, d’expérience, etc, etc. ? C’est là ce qu’il faudrait sérieusement examiner, ce qu’il faudrait analyser, discuter, soumettre à une appréciation sévère. On passe légèrement là-dessus ; on n’approfondit guère. Rien de plus superficiel et de plus dogmatique que les assertions émises sur toutes ces notions métaphysiques et logiques dont l’ensemble et la coordination forment l’objet d’une vraie théorie de la connaissance.

Nous n’examinerons pas si l’auteur a réussi à combler une telle lacune dans l’ouvrage qu’il a livré au public. Mais, ce que nous pouvons affirmer, c’est que ce livre n’est pas de ceux sur lesquels les esprits sérieux doivent passer avec indifférence. Un simple coup d’œil sur les titres des principaux chapitres fera comprendre l’importance des matières qui y sont traitées.