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analyses. — fr. harms. Die Formen der Ethik.

Schleiermacher, il juge à ce point de vue toutes les époques et tous les systèmes de la philosophie allemande.

Dans son nouvel écrit, l’auteur embrasse l’histoire entière de la morale, dont il retrace et caractérise les formes principales. Il replace ainsi la philosophie allemande dans son cadre le plus vaste, celui du développement de l’humanité considérée dans toutes ses phases essentielles.

Nous ne le suivrons pas dans les développements qu’il donne à sa thèse ; nous ne pouvons également apprécier les raisons sur lesquelles il s’appuie pour motiver chacune de ses divisions et pour établir la distinction de chacune des formes de l’éthique, telles qu’il les conçoit et les caractérise[1]. Nous nous bornons, avec quelques réflexions sur la nature et le mérite de ce travail, à reproduire l’objection principale que déjà nous avons cru devoir faire sur l’ouvrage plus important du savant professeur.

Certes, on ne peut méconnaître dans ce nouvel écrit ni l’élévation des vues, ni la sagacité des aperçus souvent profonds et ingénieux, ni le talent de l’exposition toujours claire et facile à suivre dans l’ensemble et dans les détails ; mais il n’est guère possible à un esprit un peu rigoureux de ne pas remarquer aussi la facilité avec laquelle l’auteur se contente de généralités nécessairement vagues, de ressemblances plus apparentes que réelles, sa tendance habituelle à ne pas assez tenir compte des différences dans les sujets qu’il traite, le dogmatisme fréquent de ses assertions. Il nous faudrait ici motiver nous-même notre propre jugement.

Nous nous bornons à appeler l’attention sur le titre même de ce nouvel écrit.

Qu’est-ce que l’éthique ? Et cette thèse de l’éthicisme allemand, sur quoi repose-t-elle ? Par ce mot très-vague, M. Harms entend le développement de la liberté dans le sens le plus large et le plus général.

L’univers a pour but ce développement ou ce processus de la liberté, à travers les diverses phases de l’humanité ; soit. Toutes les écoles, en effet, ont pris ce mot pour devise et ont inscrit sur leur drapeau cette formule. De cette façon, il est facile de dire que des systèmes comme ceux de Kant, de Fichte, de Schelling, de Hegel et de Schopenhauer, etc., poursuivent le même but, le but moral ; que la conception morale de l’univers leur est commune. Mais la liberté, qu’est-elle ? Une liberté fatale ou une nécessité libre. Voilà le dernier mot de toutes ces créations philosophiques. Quiconque connaît le sens de ces formules et a la moindre idée de ces vastes constructions de la métaphysique allemande ne se laisse pas prendre à un pareil langage. Le fatalisme est

  1. M. Harms reconnaît et distingue cinq formes de l’éthique : 1° la forme grecque ; 2° la forme indienne ; 3° la forme chrétienne, du moyen âge ; 4° la forme du naturalisme, antérieure à Kant ; 5° la forme de la conception morale, universelle et historique de l’univers, qui caractérise la philosophie allemande depuis Kant.