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analyses. — liard. La science positive et la métaphysique.

qu’à la condition de revêtir certaines formes, d’obéir à de certaines règles. Peut-on soutenir que ce qui rend l’expérience possible ne la précède pas logiquement ?

Les lois objectives de la pensée, lois premières et irréductibles, enveloppent tous les objets possibles et leurs relations particulières ; elles ne peuvent être révélées que par l’analyse de l’expérience, vérifiée ensuite par la synthèse. Elles doivent se trouver seules à l’origine et au terme de la science, et sont soumises à une loi régulatrice commune, la loi de non-contradiction.

Le temps et l’espace sont irréductibles, entre eux. Le temps est déterminé et défini par des rapports de succession, l’espace par des rapports de position ; l’espace a trois dimensions, le temps à proprement parler n’en a pas ; l’espace porte en lui-même sa représentation et son unité de mesure ; pour se représenter et mesurer le temps, il faut emprunter des symboles à l’espace et au mouvement. L’espace et le temps sont indispensables à toute représentation, continus, homogènes et illimités. Ils reçoivent des limites et des déterminations ; la limite et la détermination, c’est, pour le temps, l’instant ; pour l’espace, le point, la ligne et la surface. L’instant est la limite vers laquelle tend une durée finie qui diminue sans cesse ; la surface est la limite vers laquelle tend une étendue à trois dimensions dont une dimension décroît sans cesse, etc.

Le nombre est la synthèse de l’un et du multiple. Tout objet est donné à l’intuition comme plusieurs et comme un. L’élément des nombres est l’unité. Il y a une infinité de nombres, mais l’infini exprime une possibilité qui n’est jamais épuisée.

La géométrie suppose l’application du nombre à l’étendue ; cette application est l’œuvre d’une synthèse a priori qui se traduit par les axiomes indémontrables.

Les lois spéciales des phénomènes réels peuvent être appelées lois concrètes de la connaissance objective : elles comprennent la loi de substance et la loi de cause. La substance ne peut être considérée comme une chose en soi. Cette hypothèse est inutile, la substance étant inconnue ; de plus, elle est contradictoire. Si la substance est une, on ne peut expliquer la diversité des phénomènes ; s’il y en a plusieurs, comme chaque groupe de phénomènes est une multiplicité, la même difficulté se présente pour chaque substance particulière. Si ces substances sont sans lien entre elles, l’ensemble des êtres est anarchique et la science impossible. Si elles sont ordonnées, il faut pour être logique supposer des substances de second degré qui seront l’unité des premières, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on arrive encore à la substance une et universelle. Que devient la substance, demandera-t-on encore, quand l’être phénoménal est divisé ?

La substance est simplement ce qu’il y a de fixe dans les phénomènes. La critique enseigne que les faits les plus divers doivent être les modes différents d’un même phénomène fondamental. C’est à la science qu’il appartient de découvrir ce fond commun des choses objectives.