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Au témoignage du Sûtra iv, 2, 7 et du commentaire de Çankara, la résorption des fonctions intellectuelles et du prâna dans Jîva a lieu de la même façon pour celui qui possède la vraie science (vidvân) que pour celui qui ne la possède pas (avidvân). Seulement, ce dernier s’unit avec les œuvres, qui ne l’abandonnent pas, aux éléments subtils qui sont la semence du nouveau corps à l’aide duquel il doit revivre, tandis que le vidvân arrive à la délivrance qu’éclaire la science, par la porte qui sert d’issue aux veines du cœur[1].

Toutefois, il existe des cas mixtes, pour ainsi dire, correspondant à un état qu’on peut appeler l’immortalité en perspective (âpekshika). Les âmes qui se trouvent dans cet état sont celles dont la science s’est trouvée un peu trop faible pour surmonter absolument l’ignorance ; ces âmes se réunissent de nouveau aux éléments subtils, et c’est à ce propos que le Sûtra iv, 2, 8 examine la question de savoir si, quand a lieu pour elles la résorption en Jîva, les éléments subtils se dissolvent en Brahma, leur lieu d’origine. Le Sûtra soutient la négative en se fondant sur ce que les éléments subtils, en qui sont réunis les organes des sens (distincts des fonctions), ont pour cause l’ignorance et ne sauraient se dissoudre qu’alors que cesse l’existence soumise à la transmigration. S’il en était autrement, la délivrance aurait lieu pour l’homme chaque fois qu’il meurt, et les prescriptions qui concernent l’élévation sur l’échelle des mondes et la délivrance se trouveraient sans objet. Donc, quand la résorption a lieu pour les âmes qui n’ont l’immortalité qu’en perspective, les choses se passent comme dans le profond sommeil, et les éléments subtils qui sont la semence de nouveaux corps ne se dissolvent pas en Brahma.

De ce fait que ces éléments sont subtils, il résulte que la personne qui est auprès d’un mourant ne les voit pas sortir du corps (Sûtra iv, 2, 9).

Il en résulte aussi (iv, 2, 10) que le corps épais peut subir des altérations de toute sorte par l’effet de la brûlure ou d’autres causes de destruction sans que le corps subtil ait à en souffrir.

Enfin (Sûtra iv, 2, 11), la chaleur dont le corps d’un homme en vie est le siège dépend du corps subtil. C’est pour cela qu’elle abandonne un cadavre, quoiqu’il conserve sa forme, etc. Donc la chaleur réside ailleurs que dans le corps épais ; elle dépend du corps subtil qui, au moment de la mort, se sépare du corps épais.

Les Sûtras iv, 2, 12-14 établissent qu’à la mort de celui qui pos-

  1. Avidvân dehabîjabhûtani bhûtasûkshmâny âçrtya karmaprayukto dehagrahanam anubhavitum samsarati vidvâms tu jñanaprakâçitam moksham nâdîdvâram âçrayate.