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dastre.le problème physiologique de la vie

La troisième partie de la physiologie générale sera consacrée à l’étude des phénomènes fonctionnels.

En fonctionnant, l’organisme s’use et se détruit ; les phénomènes de fonctionnement sont en même temps des phénomènes de destruction du matériel de l’organisme. L’usure des organes en activité a été signalée pour ainsi dire de tout temps ; le muscle qui se contracte, la glande qui sécrète, l’œil qui reçoit l’impression lumineuse, le cerveau qui travaille s’usent matériellement et ne pourraient soutenir leur activité si une régénération incessante ne les restaurait à chaque instant. Il y a plus, la destruction matérielle ne coïncide pas seulement avec l’activité fonctionnelle ; elle en est la mesure et l’expression. Par exemple, la contraction du muscle est la traduction même de sa destruction ; il n’y a point simple coïncidence ; il y a transformation d’énergie. On rencontre ici la même loi qui régit la production des phénomènes physiques : l’apparition d’un phénomène est liée à la disparition d’un autre ; la destruction n’est qu’un changement de forme. Fick et Wislicenus, Helmholtz en Allemagne et Hirn en France ont cherché à établir que le travail du muscle était exactement représenté par la destruction (combustion) qu’il subit. On voit ainsi dans le monde vivant comme dans le monde physique l’application du grand principe de la corrélation des forces ou de la conservation de l’énergie.

Qu’est-ce que cette destruction, cette usure moléculaire qui accompagne, exprime et mesure les phénomènes fonctionnels ? Il importe de le savoir exactement. C’est une action chimique spéciale, une fermentation, une putréfaction, ou une combustion. C’est, en effet, par l’un ou l’autre de ces procédés que la matière organisée se détruit, soit par suite du fonctionnement chez le vivant, soit dans le cadavre après la mort. L’étude de chacun de ces chapitres a été brillamment commencée par les chimistes contemporains, MM. Pasteur et Dumas, qui en cela ont fait œuvre de physiologistes dans la plus complète acception du mot.


La quatrième partie de la physiologie générale comprendra l’examen des phénomènes plastiques, ou de synthèse vitale, qui régénèrent les éléments, réparent les pertes et reconstituent en quelque sorte le matériel organique. C’est un travail tout intérieur, silencieux, caché, sans expression phénoménale évidente, d’une nature plus spéciale en ce qu’il n’a pas d’analogues en dehors des organismes. Cette rénovation moléculaire comprend deux ordres d’actions : des actions chimiques, désignées dans leur ensemble sous le nom de synthèse chimique, qui élaborent et constituent la matière vivante,