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dastre.le problème de la vie

Pour M. Chauffard, il n’y a réellement pas de vie élémentaire : l’unité vitale réside dans l’organisme tout entier. Que si vous croyez apercevoir, nous dit-il, l’activité de l’élément, vous êtes les jouets d’une illusion, c’est une activité d’emprunt, le résultat d’une mutilation de l’activité totale, indivisible, entière, et seule complète. La vie étant le concert des phénomènes vitaux, une note isolée de la symphonie n’est plus la vie.

La physiologie générale ne méconnaît nullement la notion du concert vital ou celle de l’évolution : elle les analyse, puis elle les féconde et les éclaire par la notion de la vie élémentaire. Elle s’attache à l’histoire du composant infiniment petit comme au préambule logique d’une histoire générale de l’être complexe. Accorder à chacune des trois notions de la vie la part et la place qui lui reviennent est-ce la marque d’une pensée hésitante et prête à toutes les concessions ? La notion de vie élémentaire est objet de science, et Cl. Bernard en fait la chose propre de la physiologie générale : la notion de révolution et celle du concert des phénomènes vitaux, bien qu’indéniables, sont surtout objet de métaphysique, et Cl. Bernard, séparant ce qu’il y a d’objectif dans ces notions de ce qui est purement subjectif, restitue cette dernière part à la métaphysique. Il fait respecter ici « les limites des genres. »

Le concert des phénomènes vitaux, personne même parmi les vitalistes n’en a parlé avec plus de convenance. Personne n’a mieux dit que, dans la machine vivante, les activités composantes de la multitude cellulaire se contiennent et se brident les unes par les autres, se prêtant un mutuel appui, s’harmonisant et se concertant dans une belle ordonnance ; que cette solidarité des parties entre elles et avec l’ensemble fait de l’être complexe, non pas une cohue de cellules, mais un système lié, un individu où les parties sont subordonnées au tout, où le tout est subordonné aux parties, où l’organisme social a ses droits, comme l’individu a les siens. La difficulté est de faire la juste mesure à chacun ; la doctrine vitaliste, qui est une manière de socialisme physiologique, n’y réussit pas mieux que le mécanicisme, qui de son côté est une forme d’anarchie. La vérité est entre les deux.

La subordination du tout aux parties résulte de ce que celles-ci sont en réalité les seules dépositaires de l’activité vitale, et qu’à cet égard il n’y a rien dans le tout qui ne sorte d’elles. Quant à la nature et aux limites de cette dépendance, Cl. Bernard les a exprimées de la manière la plus pénétrante, par la loi de la constitution des organismes.

La structure de ces édifices complexes qui sont les espèces ani-