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analyses. — dühring. Kritische Geschichte der Mechanik.

Dr. E. Dühring. — Kritische Geschichte der allgemeinen Principien der Mechanik (Histoire critique des principes généraux de la mécanique). 2e édit., en partie refondue et augmentée d’une introduction à l’étude des mathématiques, 1 vol. in-8o, 562 pages. Leipzig, 1877.

Les sciences physiques en général ont pour objet d’observer des phénomènes, d’en déterminer les lois, de les ramener à des phénomènes de mouvement. Ce dernier point est essentiel. L’optique est aujourd’hui la partie la plus parfaite de la physique, parce que, moyennant une hypothèse convenable, elle explique par des mouvements tous les phénomènes dont elle s’occupe. La mécanique est la science du mouvement ; elle est donc en quelque manière la science des sciences. C’est par elle que toute théorie scientifique peut acquérir la rigueur et la netteté mathématiques ; c’est sur elle que doit se fixer l’attention de tout esprit curieux d’approfondir la philosophie des sciences.

On peut étudier la mécanique de bien des façons : il est utile de distinguer ici trois points de vue principaux.

Si l’on se place au point de vue métaphysique, on devra d’abord rechercher les idées et les principes fondamentaux de la science : principe de la moindre action, des vitesses virtuelles, etc. Ces principes, une fois connus, devront être soumis à une critique convenable. Kant et surtout Leibniz ont suivi cette méthode.

Si l’on préfère le point de vue logique, on s’efforcera de déterminer la valeur relative des vérités dont le système constitue la science tout entière. Ensuite, on montrera comment une multitude infinie de vérités importantes ne sont que les conséquences nécessaires d’un petit nombre de principes très-simples et presque évidents. Cette méthode est bien moins aisée que séduisante. Toute science, quelque parfaite qu’elle soit, présente au point de vue logique de grandes difficultés. Considérez la plus ancienne et la plus fortement constituée des sciences positives, la géométrie élémentaire. Il semble qu’il n’y ait ici matière à aucune divergence d’opinion. Et pourtant étudiez l’ordre des propositions dans quelques-uns des traités célèbres acceptés à bon droit comme classiques, les Éléments d’Euclide, la Géométrie de Legendre, vous observerez des différences surprenantes. Que si, poursuivant dans cette voie, vous examinez les critiques d’esprits éminents, comme M. Hoüel[1] et M. Duhamel[2], vous en arriverez presque à soupçonner qu’au point de vue logique, la géométrie élémentaire n’est pas encore absolument constituée. Des difficultés du même genre, mais beaucoup plus graves, se rencontrent dans la mécanique. D’après la tradition de l’enseignement, au moins en France, le problème fondamental de la science est le problème de l’équilibre. La statique, qui donne la solution

  1. Essai critique sur les principes fondamentaux de la géométrie élémentaire. Paris, 1867.
  2. Des méthodes dans les sciences de raisonnement. Paris, 1866.