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perception directe, parce que le monde est infini et que nous en connaissons seulement une très-petite partie. La doctrine de Copernic doit s’appliquer à la philosophie d’une autre manière et meilleure que Kant ne l’a cru. Ce que la terre est au système solaire, ce que celui-ci est aux cieux étoiles, notre monde visible l’est au monde invisible. La fonction de la réflexion, elle aussi, se prête à une semblable analogie. L’astronome ne peut quitter la terre, et, bien que la terre ne soit pas le centre du monde, la position de l’observateur est pour lui une position centrale ; il est pour lui-même, subjectivement, le centre du monde qu’il observe. lien est de même, en philosophie, de la position occupée par la conscience de soi, par la réflexion. Elle est au centre de toutes choses pour elle-même ; mais elle reconnaît que cette position est subjective, et elle découvre un monde auquel ne peuvent atteindre les télescopes de l’astronome.


En résumé, M. Hodgson, dans ce livre, adressé, comme il le dit quelque part, ad clerum, le plus profond, mais aussi le plus germanique des livres anglais, à notre connaissance, et tel qu’une analyse ne saurait peut-être le faire comprendre que très-imparfaitement, M. Hodgson s’est efforcé de montrer la nécessité où nous sommes de considérer la philosophie comme une branche distincte de la connaissance humaine. À ce prix seulement, nous pourrons systématiser tous les genres de connaissance et échapper à l’anarchie intellectuelle et morale. Pour cela, il a donné d’abord une théorie précise des rapports de la philosophie avec les autres sciences, et ensuite de l’objet de la philosophie elle-même, de sa méthode, de son contenu, de ses divisions et de leur enchaînement.

Le point du système auquel tout le reste se rapporte est le point central de toute connaissance, le fait phénoménal de la réflexion. C’est en conséquence de ce fait, qui devient son principe, que la philosophie existe et se distingue des sciences. L’histoire de la philosophie est l’histoire de l’apparition de ce fait dans le monde, de ses développements, de la netteté de plus en plus complète avec laquelle les philosophes l’ont observé et compris. La doctrine proposée par notre auteur se distingue de toutes les autres en ce que ce fait s’y trouve mis en une plus vive lumière que partout ailleurs.

Le monde dans son ensemble ne se compose que de phénomènes. Parmi eux apparaît le phénomène de la réflexion, qui, sous certaines lois, donne à tous les autres leur véritable sens en provoquant la distinction de l’aspect subjectif et de l’aspect objectif, de la connaissance et de l’existence. Par suite, le monde soi-disant extérieur se trouve posé en face de la conscience individuelle, qui, pour elle, le