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espinas. — philosophie expérimentale ex italie

l’atavisme) des combats et des rapts furieux, des scènes de brutalité mêlées aux scènes d’amour, dont nos premiers ancêtres ont dû souvent, comme les sauvages les plus infimes et les animaux, donner le spectacle en guise de noces.

L’apparition de ces cas d’atavisme est fatale, et les actes commis par ces Fuégiens ou ces Canaques déchaînés, en pleine civilisation, sont absolument nécessités par la structure imparfaite de leurs centres nerveux. Soltmann a montré que, chez les mammifères nouveau-nés, la substance corticale du cerveau n’est pas encore pourvue de centres spécialisés à tel ou tel mouvement, et que cette spécialisation ne se fait que plus tard, progressivement. Chez les natures prédestinées au crime, l’arrêt de développement qui produit l’infirmité morale peut donc se faire tardivement et cette infirmité rester jusque-là inaperçue. De plus, alors même qu’extérieurement le crâne paraît normal, la structure du cerveau peut être fortement altérée sans que la santé physique en souffre, c’est-à-dire sans que les fonctions vitales inférieures soient compromises. Des méningites chroniques dont plusieurs homicides étaient atteints (Benoist, Lemaire, Freeman, Momble, Léger) ne se sont révélées qu’à l’autopsie. Ailleurs on trouve, toujours après la mort, soit des adhérences des cornes postérieures du cerveau, soit une pointe osseuse qui s’insinue dans le lobe frontal, soit des circonvolutions rudimentaires, soit des cellules pigmentaires mêlées aux cellules cérébrales, soit le canal central de la moelle oblitéré, quelques-uns de ces caractères pouvant se rencontrer ensemble dans le même individu, et toujours le vivant a été sain de corps et en apparence d’esprit, avec des tendances au vol et à l’homicide. Faut — il conclure de tels faits que les criminels ne sont pas responsables ? Il serait aussi ridicule de le prétendre que de soutenir qu’on doit se laisser massacrer ou piller par les sauvages, parce qu’ils ne sont pas libres (en raison de leur structure cérébrale à laquelle toute leur complexion physique et morale est liée), de concevoir le juste et l’injuste à notre façon. De ce point de vue, la répression est à la fois nécessaire et légitime, légitime parce qu’elle est nécessaire. La société a le droit de punir, ayant celui d’exister. Elle n’a pas pour mission de venger la morale absolue ; rien d’absolu ne tombe sous la portée de l’intelligence humaine. Elle a un suprême intérêt, se défendre, et défendre avec elle la civilisation, la paix commune, le travail, l’épargne, les sentiments les plus nobles sans cesse menacés ou insultés par cette insurrection de barbares. Cela suffit : ici, l’intérêt et la justice ne font qu’un.

Partant de ces principes, M. Cesare Lombroso étudie la thérapeutique du crime ; il eût mieux fait de dire la prophylaxie, puisque,