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54 REVUE PHILOSOPHIQUE

la sensation de lumière, par exemple, est nulle quand l'éclat du corps lumineux est égal à celui de dix bougies ; qu'elle est négative ou posi- tive quand cet éclat est inférieur ou supérieur. Mais nous savons, d'un autre côté, que pour qu'une pareille graduation ne prête pas à l'équivoque, il faut toujours avoir présente à l'esprit la signification du zéro, et qu'il est utile en pareil cas de savoir de combien il s'élève au-dessus du zéro réel, du zéro absolu de sensation.

Or la sensation, nous le savons tous, peut être nulle. On peut ne rien voir, ne rien entendre, ne rien odorer, ne rien goûter, n'avoir ni froid ni chaud. Il semble donc naturel de placer le zéro de la sen- sation à ce zéro réel. Si c'est là ce que l'on fait et si l'échelle est convenablement tracée, la sensation 6 sera le double de la sensa- tion 3, le triple de la sensation 2, la moitié de la sensation 12, et Funité de sensation qui va de à 1, de 1 à 2, de 2 à 3, et ainsi de suite, est la différence choisie entre deux sensations de même nature prises arbitrairement. Si l'on place le zéro à ce point, la portion négative de l'échelle devient inutile, parce qu'au-dessous de l'absence de sensation il n'y a toujours que la même absence de sensation, comme au-dessous du rien de chaleur il n'y a que le rien de chaleur. Il en est autrement quand il s'agit de pression manométrique; après le rien de pression vient la pression en sens contraire, la contre- pression ou.raspiration.

Il semble qu'il n'y ait donc pour le zéro de sensation que deux genres de places possibles. Eh bien, Fechner en a trouvé une troi- sième. Son zéro correspond à un moment où la sensation est nulle, mais au-dessous de son zéro il y a place pour autant de sensations négatives qu'il y a de sensations positives au-dessus.

Voici sur quelle observation est fondée cette singularité. Le zéro effectif de sensation ne correspond pas uniquement au zéro d'excita- tion : la lumière peut être tellement faible qu'on ne la voie pas, le son tellement léger qu'on ne l'entende pas, etc. En un mot, l'impres- sion n'est vraiment sentie que quand l'excitation a acquis une certaine importance, arrive à un certain point, et ce point est ce que l'on appelle le seuil. C'est à ce moment que Fechner met la sensation zéro, et les sensations négatives correspondent à ces actions non senties exercées par les excitations au-dessus du seuil ', qui est lui-même pris pour unité d'excitation.

1. Voici pour les mathématiciens la mise en équation du problème d'après Fechner. dS, — k £ est l'équation différentielle de la loi psychophysique.

En intégrant il vient : S = k log E + g. Pour déterminer la constante q, Fechner pose que Ion a : S = pour E = b = 1 ; b étant ce qu'il appelle le seuil, quantité éminemment positive. De là : S = k log ^ = k log E.

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