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herbert spencer. — études de sociologie.

avec l’organisation sociale basée sur le type militant, et qu’il décroît avec le développement du type industriel.

V. — Salutations.


En parlant d’un parti de Chochones qu’ils avaient surpris, Lewes et Clarke disent : « Les deux autres, une femme un peu âgée et une jeune fille, voyant qu’elles ne pouvaient échapper, parce que nous étions trop près, s’assirent par terre et, baissant la tête, paraissaient résignées à la mort, dont elles se croyaient menacées. La même coutume de baisser la tête et d’inviter l’ennemi à frapper, quand toute chance de salut a disparu, s’est conservée en Égypte jusqu’à ce jour. » Ici le moyen employé pour attirer la faveur d’autrui est la soumission absolue ; les actes accomplis sous cette inspiration donnent naissance aux salutations.

Quand, pour prouver que la cérémonie précède non-seulement l’évolution sociale, mais même l’évolution humaine, j’ai cité, au début, l’exemple du petit chien qui se couche sur le dos à l’approche d’un grand chien qu’il redoute, un grand nombre de lecteurs ont probablement pensé que mon interprétation de cet acte était un peu forcée. Ils n’auraient pas eu cette pensée s’ils avaient su que parmi les êtres humains nous rencontrons un procédé analogue. En décrivant la salutation des Batokas, Livingstone dit : « Ils se couchent par terre sur le dos, et, se roulant de çà de là, ils frappent les côtés extérieurs de leurs cuisses en signe de reconnaissance et de bienvenue. » Que cette attitude soit instinctive ou qu’elle ait été admise sciemment, elle semble dire : « Vous n’avez pas besoin de me soumettre, je suis déjà soumis, » et elle est le meilleur moyen d’écarter le danger. La résistance engendre l’antagonisme et éveille les instincts destructeurs. L’animal ou l’homme de force supérieure deviennent moins dangereux quand l’animal ou l’homme plus faibles se soumettent passivement, parce que dans ce cas rien n’excite la passion de vaincre. Telle est donc la genèse naturelle de cette salutation où l’on se couche sur le dos. Cette position est peut-être entre toutes la plus propre à empêcher toute défense personnelle. Je dis peut-être, car il y a une autre attitude qui rend également faible et qui témoigne à un plus haut degré une soumission complète. « À Tonga-Tabou… les gens du peuple montrent… au chef suprême, le plus grand respect imaginable en se prosternant devant lui et en posant son pied sur leur cou. » La même chose a lieu en Afrique. Laird dit : « Les messagers envoyés par le roi de Fundah s’inclinèrent