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delbœuf. — la loi psychophysique

jusqu’à ce que toute sa force d’impulsion soit épuisée goutte à goutte. Or le corps se compose de molécules, et le choc subi par l’une se répartit, se divise sur toutes les autres ; mais les résultats de la division restent finis. Imprime-t-on au contraire une certaine vitesse à un corps matériel, le choc se propage de molécule à molécule dans son intérieur ; les molécules, lancées les unes contre les autres, se repoussent, puis se relancent de nouveau, et l’ébranlement général persiste indéfiniment, tout en variant sans cesse d’aspect et de figure. Et quant au mouvement continu, comme celui des planètes dans les espaces éthérés, on doit se le figurer comme étant accompagné de soubresauts moléculaires revêtant une apparence de périodicité. C’est ainsi que se meut la Terre, continuellement secouée dans toute la profondeur de sa masse. Je viens de dire une apparence de périodicité. C’est qu’il n’existe même pas de périodicité dans le sens strict du mot. Si une portion quelconque de matière pouvait, après un temps donné, revêtir un état identiquement semblable à un état antérieur, toutes ses manières d’être intermédiaires seraient des effets sans cause.

J’ai été autrefois frappé d’une expérience de M. Plateau[1]. Voici la question qu’il s’était posée : Ne serait-il pas possible de soutenir en l’air une aiguille aimantée, sans aucun point d’appui et dans un état d’équilibre stable, par les actions émanées d’autres aimants convenablement disposés ? On voit tout de suite quel rapport il y a entre ce problème et la légende du tombeau de Mahomet aussi suspendu dans le vide par un puissant aimant.

Après avoir tenté de réaliser la chose expérimentalement sans jamais y réussir, le savant physicien s’était ensuite convaincu par le calcul qu’elle était impossible. Mais de ses formules il déduisit certaines positions d’équilibre curieuses. Voici celle qui se rattache à mon sujet. Je laisse la parole à ré minent professeur, détachant de son Mémoire les seuls passages qui nous intéressent spécialement :

« Supposons qu’on suspende verticalement un puissant aimant en fer à cheval, les pôles en bas, puis qu’on amène sous les surfaces polaires une aiguille aimantée placée horizontalement et tournée de manière que chacun de ses pôles soit attiré par le pôle situé au-dessus de lui. Il y aura nécessairement une distance aux surfaces polaires, pour laquelle le poids de l’aiguille fera exactement équilibre à l’attraction de l’aimant… Dès lors, en vertu de ce qui précède, l’équilibre de l’aiguille entière sera stable horizontalement dans

  1. Sur un problème curieux de magnétisme, Mém. de l’Acad. de Belgique, tome XXXIV.