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est simplement une autre expression pour désigner l’antilogique) est le ressort qui fait marcher le processus ; mais il a tort d’en tirer des conséquences « réaldialectiques ». Car la négation de ce qui ne doit pas exister ou de l’antilogique, loin d’être une contradiction, est bien plutôt la négation de la contradiction inhérente à l’antilogique. L’opposition des attributs de l’absolu (c’est-à-dire du logique et de l’antilogique) ne tombe donc pas, comme Bahnsen le croit, sous le concept de sa dialectique réelle antilogique, mais plutôt sous celui du processus logique. La contradiction est uniquement et exclusivement inhérente à la volonté, qui est seulement illogique à la première puissance, mais devient antilogique par élévation à une puissance supérieure[1]. Bahnsen a complètement raison de dire que ce qui se contredit est contradictoire en soi-même, avant que le logique le nomme ainsi ; mais il oublie que le logique peut seul arriver d’abord à reconnaître comme lui étant contraire ce qui se contredit soi-même, et à le définir comme antilogique[2]. La volonté étant à sa première puissance quelque chose d’illogique et contenant en elle-même d’éternité en éternité la possibilité de devenir antilogique par élévation à une puissance d’un plus haut degré, on peut aussi prétendre avec raison que la scission spontanée de l’Être un et universel en attributs opposés a lieu pendant toute l’éternité. Bahnsen n’a donc pas tort, quand il conteste la possibilité de la naissance d’une discorde, à moins que l’absolu ne soit éternellement discordant en lui-même, et quand à un autre endroit il appelle l’attention sur ce fait que toute finalité (par conséquent aussi un processus téléologique) « est basé sur la coexistence d’une pluralité » et à la vérité d’une pluralité éternelle, s’étendant au-delà du temps. Il a également raison de soutenir que la pluralité intérieure de la substance unique, nécessaire pour la production d’un processus, n’a plus besoin d’exister postérieurement comme dualité. Seulement il a tort de chercher dans une scission intérieure de la volonté la scission primordiale, éternelle de l’absolu, d’où doit résulter toute individuation ultérieure. Il aurait dû la chercher dans l’opposition des deux attributs delà substance unique. Mais cette erreur est tout simplement la conséquence d’avoir fait une hypostase de la volonté ; c’est elle qui le porte à méconnaître la position attributive de cette dernière.

  1. Conf. Philosophie de l’Inconscient. 7e éd., II, 396-497, et 443-444.
  2. La désignation de « contradiction » (à savoir avec soi-même, le logique), telle qu’elle se trouve dans la Philosophie de l’Inconscient, 7e édit., vol. II, p. 244, ligne 1-2, est inexacte, et doit être modifiée. Comme les contraires ne conviennent pas à la substance absolue sous un seul et même rapport, ils ne peuvent créer aucune contradiction ; il y a là seulement le commencement d’une opposition dans le sens logique.