Page:Revue pédagogique, second semestre, 1892.djvu/405

Cette page n’a pas encore été corrigée
395
UN SOUVENIR DES EXAMENS DE LA VIEILLE SORBONNE

poussé par ses maîtres et ses condisciples de Navarre, Bossuet s’obstina ; et, après un échange de vives apostrophes, tout à coup, rompant en visière, il se transporta, suivi des siens, au monastère des Jacobins, situé rue des Grès, où il acheva sa soutenance. Un procès s’ensuivit entre le collège de Sorbonne, qui demandait l’annulation de l’épreuve, et la maison de Navarre, qui en soutenait la validité. Les Navarrais ne s’étaient jamais montrés plus animés. Ils n’avaient pas encore pardonné à Richelieu, élève de leur Maison, d’avoir réédifié la Sorbonne ; la chaire de théologie fondée par le cardinal au collège de Navarre ne leur était pas une compensation suffisante. D’autre part, la Sorbonne était devenue trop puissante pour n’avoir que des amis. Les Dominicains et les autres corporations de réguliers, les ubiquistes qui n’avaient aucun droit à entrer dans le différend, prirent parti contre elle. La Faculté voulut évoquer l’affaire. La Sorbonne récusa son autorité : la Faculté n’avait pas à connaître de la question, encore moins à la trancher ; le Parlement, qui avait été saisi, pouvait seul la résoudre. Aussi bien la prérogative du prieur n’était pas contestable : il pouvait n’en pas réclamer l’application rigoureuse ; dès qu’il l’avait invoquée, il devait y être satisfait. Les sages essayèrent vainement de « moyenner la paix ». Le président Molé, qui intervint de sa personne, échoua comme les autres. Il fallut un arrêt.

Le registre d’audience de la Grande Chambre du 26 août 1651 porte : « Ledit Bossuet comparut, qui a fait discours en latin ». L’avocat général Omer Talon reconnut « que le candidat avait rendu à la Cour des preuves de sa suffisance ». Mais il déclara que cette suffisance ne l’autorisait pas à outrepasser les règles. Sur ses conclusions, le Parlement statua : 1° que les Sorboniques se feraient toujours dans la Maison de Sorbonne, sans pouvoir être transférées ailleurs, s’il n’était ordonné autrement ; 2° que cette fois néanmoins, et sans tirer à conséquence, l’acte commencé en Sorbonne et achevé aux Jacobins demeurait pour Sorbonique, mais les bacheliers qui répondraient en Sorbonne communiqueraient au prieur leurs thèses et les preuves d’icelles signées de leur main ; 3° qu’ils devraient dire au prieur en l’acte de Sorbonique « Dignissime domine prior ».

Ce ne fut pas tout à fait le dernier mot. Bossuet, à la fin de la session, fut nommé par ses condisciples Paranymphe, c’est-à-dire