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REVUE PÉDAGOGIQUE

pour entendre un ou plusieurs arguments. Les femmes assistaient derrière les écoutes, invisibles et présentes : c’est là que plus tard Manon Lescaut, avertie par la publicité, retrouva l’abbé des Grieux qu’elle avait abandonné[1]. « Mandez-nous ce que vous savez des nouvelles Sorboniques », écrivait — on impatiemment du fond de la province. Dans une série de lettres[2], le Mercure galant mettait ses lecteurs et ses lectrices au courant de tous les détails de l’examen, depuis les passes d’armes préparatoires jusqu’aux fêtes des Paranymphes qui fermaient et couronnaient la session.

Tout Paris s’intéressait aux Paranymphes. C’était la fête annuelle des étudiants en théologie. Elle tenait à la fois de la mercuriale et de la saturnale. Dès le lendemain de la clôture des Sorboniques, les candidats se réunissaient encore une fois en la grande salle, et debout, découverts, ils demandaient leur congé, manumissionem à scolis. Le syndic de la Faculté, qui prononçait la formule de la libération, accompagnait d’ordinaire sa réponse de quelques bons avis sur les défauts qu’il avait remarqués dans la série des nouveaux licenciés. Dès ce moment, ils étaient affranchis de cours, et, comme on disait, d’enfants théologiens, devenus hommes, viri theologici. Quelques semaines après, le lundi de la Septuagésime, le chancelier les convoquait pour recevoir le brevet. Et alors commençaient les Paranymphes. Chaque Maison avait la sienne. Par chaque Maison il faut entendre ici les étudiants de Sorbonne, ceux de Navarre, les ubiquistes qui suivaient à la fois les cours de Navarre et de Sorbonne, enfin les réguliers ; ils formaient quatre familles distinctes. On plaçait toutes les réunions dans la même semaine, mais à des jours différents, de façon que les diverses Maisons pussent assister aux fêtes les unes des autres. Revêtus de la fourrure et couverts du bonnet, — c’était la première fois qu’ils portaient ces insignes, – ils se rendaient d’abord à l’officialité de Notre-Dame auprès du chancelier de l’Université à qui appartenait l’honneur d’inaugurer les fêtes ; puis, au jour qui leur avait été assigné, ils commençaient leurs démarches d’invitation. Elles ne comprenaient pas moins de treize stations dans un ordre hiérarchiquement déterminé ; la

  1. Histoire de Manon Lescaut, 1re partie.
  2. Août 1709 à avril 1710.