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UN SOUVENIR DES EXAMENS DE LA VIEILLE SORBONNE

la tête couverte. Olivier d’Ormesson raconte qu’en 1646, lorsque le prince de Conti vint soutenir sa Tentative, « il était sur un haut dais élevé de trois pieds, à l’opposite de la chaire du président, dans une chaise à bras, auprès de lui M. le Prince, à sa droite M. le Chancelier, à sa gauche M. le duc d’Aumale. On attendait M. le cardinal Mazarin qu’on ne vit point[1]. Deux ans après (24 janvier 1648), c’était le grand Condé qui venait assister à la soutenance de Bossuet, et peu s’en fallut que le vainqueur de Rocroy, entraîné par l’ardeur de la controverse, ne chargeât avec impétuosité le jeune théologien.

C’étaient là sans doute les grandes journées pour la Tentative et les Ordinaires ; il n’y avait pour les Sorboniques que de grandes journées. Les autres examens se passaient le plus souvent dans les écoles extérieures ; la Sorbonique ne pouvait avoir lieu qu’à la Sorbonne, en la salle des actes. « Une licence de théologie de Paris, dit le grave Quesnel à l’occasion de la thèse d’Arnaud, est dans le genre des exercices de la littérature un des plus beaux spectacles qui se trouvent au monde par le concours des savants de tout ordre qu’elle accueille, ainsi que par l’intérêt des débats qu’elle soulève. » La comparaison avec les solennités des jeux olympiques de la Grèce ne paraissait point exagérée. On offrait aux souverains étrangers qui venaient visiter la Maison une soutenance de Sorbonique, comme à la cour une représentation de gala.

La période des examens, qui durait de la Saint-Pierre à la Sainte-Catherine (juin à décembre), s’ouvrait en grande pompe sous la présidence du prieur. La maréchaussée était convoquée pour garder les deux portes d’entrée et fournir dans la cour une haie d’honneur. La haute magistrature, l’église, les ducs et pairs avaient, dans la salle, leur place marquée. Louis XIV se faisait rendre compte de la séance. Saint-Simon ne dédaignait pas d’en peindre le tableau[2]. Pour chaque candidat les gazettes annonçaient le jour de l’épreuve. La famille lançait des invitations[3]. On se donnait rendez-vous

  1. Journal, I, p. 351. — Cf. Gazette de France, juillet 1646, p. 603 et 604.
  2. Mémoires, t. III, p. 16. Cf. II, p. 19.
  3. Voici le texte d’une de ces invitations que nous avons retrouvée dans les archives de la Sorbonne (Carton xxxi, in-4°) : « M. Vous êtes prié de la part de M. Desmarest, ministre d’Estat, controlleur général des Finances, de luy faire l’honeur d’assister à la Thèse que monsieur l’abbé Desmaretz son fils soutiendra en Sorbonne jeudy premier jour du mois de mars 1714 à trois heures. »