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l’Iliade de M. de la Motte (1714) ; une Dissertation sur le poème épique contre la doctrine de Madame Dacier (1717), et la même année, une autre dissertation sur les langues en général et sur la langue française en particulier. Nous n’essaierons pas d’apprécier, après Sainte-Beuve, la valeur de ces ouvrages de polémique littéraire. Notons seulement qu’on attribue à l’abbé de Pons la création du mot « érudit », qu’il lança comme une injure à la tête de ses adversaires ; et arrivons à un petit traité que Sainte-Beuve ne fit que signaler en passant, avec un mot d’éloge. Il s’agit d’un Nouveau système d’éducation, paru d’abord dans le Mercure au mois de juillet 1718. Cet opuscule est précédé d’un « Petit éclaircissement sur la définition de l’éloquence », qui montre qu’aux yeux de l’auteur l’orateur parfait est le type idéal de l’homme tel que l’éducation doit tendre à le former. Quelle marche faut-il suivre pour se rapprocher de cet idéal ? c’est ce que l’abbé de Pons se propose de montrer dans son Nouveau système d’éducation ou Nouvelle méthode pour former la jeunesse française.

Dès qu’il est né, l’enfant entre en relations avec le monde extérieur, « son petit cerveau reçoit, pour ainsi dire, l’empreinte des visages humains, des animaux domestiques et de tous les êtres qu’il aperçoit habituellement : il a de tous les objets variés des idées distinctes avant que de savoir comment on les nomme ; il pleure à la vue des objets qui l’ont mal affecté, il sourit à ceux qui lui ont fait quelque plaisir. À mesure que son imagination acquiert des idées nouvelles, son jugement se complaît à comparer les rapports qui sont entre elles : il entend parler, et tel est le penchant naturel de l’homme à l’imitation que notre enfant veut parler aussi : il s’essaie, il balbutie, il parvient enfin à trouver de lui-même toutes les articulations de la langue. » La curiosité naturelle de l’enfant est éveillée, ses jeux mêmes décèlent son désir de savoir ; il importe de ne pas rebuter ses premiers efforts pour s’instruire. « Rendons raison de tout aux enfants avec une douceur patiente. » L’abbé de Pons ne veut pas que les premières années de l’enfant soient consacrées à l’étude des langues anciennes. Il maudit « ces rudiments, ces Despautères, fléau du premier âge », qui ne sont bons qu’à inspirer le dégoût de la science. À l’entendre, c’est une méthode qui se justifiait autrefois par la pauvreté de notre littérature, mais à laquelle on doit renoncer