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SUR L’INSTRUCTION DES INDIGÈNES EN ALGÉRIE

âgés, d’une saine émulation pour le travail et pour le bien, de traditions excellentes qui se conservent en s’améliorant…

Cette éducation doit être complétée par des leçons méthodiques, qui doivent prendre une heure par semaine dans le cours moyen. Le programme qui en a été tracé ne renferme rien qui ne soit à la portée de tous les esprits, rien qui ne s’accorde avec toutes les croyances religieuses. Il comprend les devoirs de morale courante, ceux que reconnaît et pratique un honnête homme, à quelque race, à quelque culte qu’il appartienne.

Il faut bien qu’on le sache : la France n’entend faire parmi les musulmans aucune propagande religieuse ; elle pratique la plus large tolérance à l’égard de tous les dogmes. Elle ne poursuit qu’un but : faire des enfants arabes et kabyles des hommes de bien, et on peut pratiquer la vertu tout en restant fidèle musulman. Elle demande donc à ses instituteurs, français ou indigènes, de montrer le plus grand respect pour les croyances des élèves et de leurs parents, de s’abstenir scrupuleusement de la moindre critique à l’égard des doctrines du Coran. Les moniteurs se tromperaient s’ils se figuraient qu’en affichant l’irréligion ils répondent aux intentions de l’administration ou lui sont seulement agréables. Un tel zèle, inspiré peut-être par de louables sentiments, serait toujours maladroit, parfois même coupable. La France ne couvrirait pas de son patronage un prosélytisme tellement en contradiction avec ses idées de liberté. Pour exercer une action bienfaisante et efficace, les moniteurs doivent jouir de la confiance de leurs coreligionnaires : ils la perdront s’ils ne « disent la formule », s’il ne se privent de boissons alcooliques, s’ils ne s’astreignent aux pratiques du ramadan. Respectent-ils, au contraire, les prescriptions du Coran, ils auront une incontestable autorité pour parler au nom de la France, pour enseigner la morale[1]

À ce programme de culture générale, il faudra joindre, ainsi qu’il a été dit plus haut, un plan d’éducation pratique. Ces enseignements pratiques sont :

Le dessin (2 heures par semaine dans le cours élémentaire et 2 heures dans le cours moyen), qui, en dehors de ses avantages éducatifs, a une utilité pratique. Chez les Kabyles en particulier, l’école rendra, en l’enseignement, des services qui seront vite appréciés car le dessin sera un élément de prospérité pour certaines industries locales qu’il faut encourager.

Le travail manuel et agricole (1 heure 1/2 par semaine dans le cours préparatoire, 3 heures dans le cours élémentaire et 3 heures dans le cours moyen ; nous allons jusqu’à autoriser 7 heures 1/2 par semaine dans chacun des trois cours, au moins à l’époque des travaux ruraux, pour les écoles qui possèdent un jardin ou un champ de

  1. Plan d’études et programmes de l’enseignement des indigènes en Algérie.