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Edgar Quinet et les Roumains.


D’Annunzio a parlé au peuple romain ; et celui-ci a répondu en acclamant la guerre qui doit libérer ses frères encore opprimés. Une fois de plus, un poète a repris le rôle auguste de conducteur des foules et de prophète de l’avenir : car ce qui n’est encore aujourd’hui qu’une parole dans sa bouche, deviendra la réalité demain. On a regretté qu’en France nous n’ayons pas, à l’heure qu’il est, aussi un grand poète pour enthousiasmer les âmes. Mais peut-être n’en avons-nous pas autant besoin ; et puis, nous en avons eu, et même plusieurs, bien que nous ne les ayons pas toujours écoutés, Michelet et Quinet furent en leur temps les maîtres de la jeunesse, et telles de leurs pages méritaient de demeurer classiques : lues en effet dans les classes, elles formeraient encore aujourd’hui la conscience des générations. Telles sont, par exemple, les pages d’Edgar Quinet sur les Roumains. Elles furent écrites en 1856, dans l’exil et dans le deuil : Quinet était à Bruxelles, proscrit de l’Empire ; et il venait de perdre son beau-fils, un enfant de seize ans, né précisément à Jassy, d’un père roumain. Les considérations géographiques, historiques, linguistiques, sociales et religieuses, qu’il présente sur la Roumanie, se retrouvent, à soixante ans de distance, d’une émouvante actualité.

Géographiquement, le pays se compose de deux parties inséparables : d’abord un vaste plateau, que bordent les Karpathes, en demi-cercle, en couronne, disaient les géographes anciens : c’est le massif de Transylvanie, qui regarde au sud et à l’est le cours inférieur du Danube ; plusieurs affluents moldaves ou valaques du grand fleuve prennent leurs sources sur ce plateau. Puis. à sa base, et le contournant du sud-ouest au nord-est, ce sont les vastes plaines de la Valachie et de la Moldavie, qui s’étendent