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REVUE PÉDAGOGIQUE

Pour mieux éclairer ceux qui pénétreront dans les prisons et auront à s’occuper des « détenus-écoliers », il n’est pas inutile maintenant de revenir, un instant, aux définitions posées plus haut et de comparer l’école pénitentiaire avec l’école ordinaire : — celle-ci prépare au classement social, celle-là au reclassement social. Ces deux sortes d’écoles, sans être identiques, sont donc analogues.

En effet, considérons les procédés employés par l’école ordinaire pour préparer les enfants et les adultes au classement social. Pour cela, il faut se défaire de quelques préjugés surannés. Beaucoup, en effet, ne voient dans le travail de l’écolier que l’exercice scolaire : épeler, lire, apprendre, réciter, écrire, compter, etc. Si nous n’avions que cela pour nous aider à vivre « classés », notre bagage serait maigre. Or, au fond de tous ces exercices scolaires, je trouve deux idées essentielles, éternelles : 1° on apprend à l’enfant à être attentif, à juger, enfin à produire un effort régulier ; 2° on l’aide à emmagasiner quelques connaissances, qu’il utilisera plus tard d’une façon quelconque. Bref, il se forge un instrument, un outil qu’il appliquera à n’importe quel travail, quand, l’initiation scolaire terminée, il se spécialisera dans une tâche quelconque ; 3° ajoutez à cela l’habitude de travailler à heure fixe, de se plier à une discipline et d’en sentir l’utilité bienfaisante, et vous aurez tout ce qu’il y a d’essentiel dans l’idée d’école ou de préparation à la vie sociale.

C’est, en somme, ce programme que nous avons proposé plus haut aux instituteurs pénitentiaires. En premier lieu, avons-nous dit, il faut, par un moyen quelconque, faire contracter aux détenus l’habitude du travail, leur apprendre un métier, si infime soit-il, de sorte que, une fois libérés, ils puissent offrir leurs bras, leurs services, leur habileté. Inversement, il faudra, soit par l’initiative privée (sociétés de patronage), soit par celle de l’État (loi sur le casier judiciaire) favoriser le bon emploi, l’embauchage de ces libérés, du moins de ceux qui ne demandent qu’à travailler et à vivre honnêtement.

En second lieu, avons-nous dit, il faudrait, — ceci est infiniment plus délicat, — leur donner l’idée de la vie en société et des