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REVUE PÉDAGOGIQUE

les instituteurs, selon l’âge, les sujets, les genres, les prix. Cette proposition, reproduite par d’autres journaux pédagogiques, parait trouver bon accueil. Plusieurs déclarent qu’ils ne connaissent pas de meilleur moyen de poser une digue à l’invasion des livres qu’on peut qualifier de mauvais en ce sens qu’ils sont médiocres ou niais, lorsqu’ils ne sont pas, ce qui arrive trop souvent, immoraux et dangereux.

Langue anglaise.

Que lisent les jeunes gens ? — Un article de la Fortnightly Review de février essayait de répondre pour l’Angleterre à cette question, une de celles que les éducateurs ne doivent pas perdre un instant de vue. C’est par la lecture libre et attrayante autant que par le travail régulier de classe que se forme l’esprit des enfants et des jeunes gens. On ne saurait trop souvent se demander quelle est au juste la nature et quelle peut être l’influence des livres qu’ils trouvent sous leur main ou qui ont leur prédilection. L’auteur de l’article de la Fortnightly, M. Salmon, pas<e en revue les romans d’aventures et les journaux spéciaux au jeune âge qui se publient en Angleterre. Cette littérature, comme il l’indique, n’est pas toujours de bon aloi. Peut-être, comme semble l’insinuer le Journal of Education, l’article en question avait-il surtout pour but de recommander avec des vues intéressées une certaine catégorie de publications, empreintes de ce sentimentalisme religieux qu’on prend trop pour la morale de l’autre côté de la Manche.

M. Salmon a peut-être des raisons que nous ne connaissons pas pour mettre comme il le fait en première ligne les romans de Kingston, de M.-R. M. Ballantyne, les récits militaires de M. Henty et le journal intitulé The Boys Own Paper ; mais il y a au moins un point sur lequel il est impossible de ne pas être d’accord avec lui : c’est quand il insiste sur un danger qui inquiète aussi les éducateurs d’Amérique et sur lequel nos pédagogues ne doivent pas non plus fermer les yeux, le goût des enfants pour les romans à sensation et Ja littérature de causes célèbres ou pis encore de police correctionnelle. M. Salmon signale plusieurs exemples des effets désastreux de ces lectures morbides. Suivant lui, et là encore il exagère un peu, ce semble, les romans de Harrison Ainsworth, comme Jack Sheppard par exemple, que dévorent les élèves des écoles et les jeunes commis de la Cité de Londres, auraient détraqué nombre de cervelles et fait des conspirateurs, des vagabonds, des voleurs même de certains enfants qui auraient peut-être mieux tourné si leurs lectures avaient moins rempli leur imagination de crimes et de criminels. En tout cas, les instituteurs et les professeurs de collège rendront un service réel à l’humanité s’ils s’attachent à dégoûter les enfants de tous ces détails de meurtres, d’exécutions, de supplices, dont l’histoire n’est que trop riche, qui leur salissent l’esprit, et qui les