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nous à mourir pour la vérité. » Avec de pareils sentiments, on comprend qu’en effet on meure de douleur, à trente-six ans, pour avoir, par obéissance, mais contre toute conviction, signé le formulaire. Mais on comprend aussi que quelque chose d’humain ait manqué à cette « âpre vertu ». Ce n’est pas que comme malgré elle la tendresse ne la prenne pour ses « petites colombes ». Il n’en est pas moins impossible de ne pas condamner une éducation qui ne tend rien moins qu’à l’anéantissement de la volonté et de l’intelligence. C’est sous le bénéfice de cette réserve que nous nous joindrons aux regrets de Mlle Châteauminois : « Quelle institutrice incomparable, dit-elle, eût été Jacqueline Pascal si l’exaltation religieuse n’avait altéré ses grandes qualités ! Elle possédait la finesse du jugement, l’ingéniosité des moyens et la persévérance ardente qui triomphent des natures les plus rebelles. À travers son voile un peu trop sombre, elle demeure pour nous l’incarnation la plus pure, la plus loyale, du devoir austère accompli avec joie. On est sans force pour lui reprocher sa sévérité quand on considère qu’elle fut toujours plus sévère pour elle-même que pour autrui. Elle poursuivait un but qui lui paraissait unique et important entre tous : arracher des âmes à l’enfer pour les donner au ciel… Les éducatrices modernes, ajoute avec beaucoup de raison Mlle Châteauminois, ont une mission plus modeste et plus réalisable : elles doivent préparer les jeunes filles aux devoirs et aux noblesses de la vie humaine. »

Livres reçus au Musée pédagogique.

Petit recueil des proverbes français, par M. L. Martel, professeur agrégé au lycée de Vanves, officier de l’instruction publique. Paris, 1883, 1 vol. in-12, Garnier frères. — Les proverbes expliqués, commentés, servant de thèmes pour des développements narratifs ou autres, peuvent être un excellent moyen d’enseignement et, au besoin, d’éducation. « Je dois vous dire, disait M. Bréal aux instituteurs en 1878, que je suis grand amateur de proverbes… Pour les travaux écrits des élèves, c’est une source qu’on a un peu dédaignée et que je voudrais remettre en honneur. Quand il s’agit d’exprimer une idée morale, de traiter un sujet emprunté à l’expérience de tous les jours, il n’y à pas de meilleur thème que les proverbes, cette sagesse des nations, qu’on a un peu laissée de côté sans que je voie ce qu’on a mis à la place… »

M. Martel a entrepris de mettre à la portée des maîtres et des élèves ce trésor de la « sagesse des nations ». Il en a d’abord dressé une sorte d’inventaire, laissant de côté ceux que l’antiquité de leur forme aurait empêchés d’être facilement compris, ceux aussi — et ils sont très nombreux, surtout dans l’ancienne langue — qui ne pouvaient s’adresser à des enfants et à des jeunes gens. Il en a choisi ainsi 530, dont il fait trois catégories : les expressions proverbiales