Enseignement de la langue française
aux enfants de 6 à 10 ans.
Pendant longtemps on a cru, et certaines personnes continuent à supposer que l’étude sérieuse de notre code grammatical, tel que le présentent la plupart de nos traités élémentaires, peut conduire à une connaissance suffisante de la langue française : il y a là une confusion très-préjudiciable à la bonne direction des études et aux intérêts de la jeunesse.
Savoir la grammaire, c’est être en état de construire une phrase selon certaines règles, et d’indiquer, par des terminaisons conventionnelles ; les relations à établir entre les mots. Connaître la langue est une tâche bien autrement compliquée : c’est d’abord posséder la grammaire, puis être en mesure de comprendre le langage ou les écrits des autres, et enfin posséder un vocabulaire qui permette d’exprimer avec correction ses pensées et ses sentiments.
Parvenus à leur treizième année, les bons élèves de nos écoles écrivent assez correctement sous la dictée : les formes multiples du verbe ne les embarrassent pas trop, et ils triomphent généralement des difficultés du participe passé. Mais dès qu’on leur demande une petite rédaction, une simple lettre d’affaires ou de politesse, ils demeurent fort entrepris. Cette impuissance s’explique facilement : écrire par soi-même, c’est savoir exprimer, dans les termes convenables, ce que l’on pense, ce que l’on sent, ce que l’on désire. Or, pour réussir dans cette tâche, trois choses sont absolument nécessaires : 1° avoir des idées ou éprouver des émotions ; 2° savoir distinguer et placer dans l’ordre convenable ces idées ou ces émotions ; 3° posséder les ter-
