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LA SOURIEUSE

souriant au vent et à la neige, à la pluie et au soleil, aux tableaux gais comme aux spectacles tristes, aux regards amis comme aux visages étrangers ; à la façon d’un portrait sur la toile, indifféremment.

Enfin, Dieu mit un terme à sa honte : elle mourut. Mais quand on transporta son corps à l’église, la bière découverte selon la mode du pays, toutes les bonnes âmes s’effrayèrent de ce sourire, qui ne la quitta pas même avec la vie. Car ce n’était pas le sourire de la béatitude, qu’après leur mort on voit s’attarder sur les lèvres des saints, des confesseurs et des vierges : c’était le terrible sceau de la malédiction éternelle. La sourieuse, sa fin surtout, fit une impression profonde sur les imaginations naïves de la contrée, à preuve cette épitaphe que nous avons lue, à demi effacée, sur une très-vieille croix de pierre, dans le cimetière oti elle est enterrée : Prions Dieu qu’elle rCarâe

D^ enfer j en ce moment.

Car son souris elle emporte

Au derniev jugement.

Germain Nouveau.