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les vertus, mais sans expérience, sans connaissance du monde, toujours en péril, toujours exposée et ne succombant jamais, Rosa est un des êtres qui aient le plus de droits à la sensibilité et à l’intérêt des lecteurs. Après elle, s’offre à une curiosité et à un intérêt peu inférieurs, le mystérieux protecteur dans le sein duquel elle s’est jetée comme la colombe poursuivie par l’autour. Puis vient son valet, l’honnête, le bon, le dévoué John Brown, marié à une femme qui ne le vaut pas, à beaucoup près, et dont le caractère contraste étonnamment avec celui de cet excellent homme. Enfin, il suffit d’annoncer au lecteur qu’il trouvera dans ce roman la plus grande variété de personnages et de caractères. L’homme et la femme, dans toute leur perfection morale, dans toute la dépravation de l’immoralité, y sont, ou délicieusement, ou vigoureusement représentés. La scélératesse profonde, sous le masque de cette honnêteté dont on se contente dans le monde et qui suffit tout juste pour n’être pas pendu, y est tracée avec d’autant plus d’art, que les ménagements que garde l’hypocrisie y sont tous observés, et qu’on s’est abstenu des ressources de l’horreur. — Ce roman offre des tableaux vrais de la vie humaine, des mœurs telles que la société nous les offre ; enfin un aperçu de la grande famille qu’on appelle le monde, où le mal et le bien se rencontrent étrangement mêlés et confondus.

L’ORPHELINE DU PRESBYTÈRE, ou Fiction et Vérité, traduit de l’anglais par Defauconpret, 5 vol. in-12, 1816. — L’auteur débute, dans ce roman, par nous faire assister à la mort du grand-père de son héroïne. Le grand-père a deux fils d’un caractère bien différent : l’un habite un antique château, l’autre un modeste presbytère. Ces deux fils se marient, deviennent pères, et leurs enfants éprouvent un grand nombre d’aventures touchantes. La mère de notre héroïne est un de ces enfants ; après avoir erré dans les jardins du presbytère et dans les ruines abandonnées du château de Glenroff, elle rencontre un vil séducteur, devient coupable, est trompée, et meurt de désespoir après avoir donné le jour à une fille charmante nommée Hélène. La belle Hélène est confiée aux soins de lady Dorville, qui la conduit à Dorvill-Hall, où commencent ses infortunes, et où ses aventures se succèdent avec rapidité. Le frère de sa protectrice est un lord sombre, triste, fantasque, qui, pour calmer d’anciens remords, veut absolument épouser une jolie fille. L’orpheline se sent entraînée vers lui par un sentiment involontaire, et sans un être mystérieux auquel elle a donné son cœur dans la vallée de la caverne, on tremblerait de voir former cette union criminelle, comme la suite du roman le prouve. Le noble lord est donc obligé de repousser un penchant dont il reconnaît ensuite la véritable cause. Enfin Hélène, après avoir bravé