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prolifique Mme de Genlis, et tutti quanti, ne sont pas des romans historiques. Walter Scott, riche de matériaux et d’études, reconstruisit idéalement le passé, non-seulement dans les faits historiques, mais dans ses individualités : costumes, langages, mœurs, croyances, attitudes, il ressuscita ce qui était mort et enseveli dans la poudre ; il inventa un dialogue, une nouvelle manière enfin d’écrire l’histoire, plus voisine de la vérité que la sécheresse chronologique et l’exactitude de Mézerai. Et nous avons vu défiler devant nous Claverhouse, Burley, Rob-Roy, Louis XI, Richard, Cromwell, Charles II, Buckingham, Rochester, Charles le Téméraire, Jacques II, Élisabeth, Marie Stuart : cavaliers, têtes rondes, archers, grands seigneurs, puritains, chevaliers, serfs, pirates, abbés, dames, mendiants, astrologues, bourgeois, tout cela a pris vie et voix ; ce n’était pas de vaines paroles, des phrases mortes, c’était un langage vivant, des personnages vivants pour la pensée ; notre admiration les a salués à mesure qu’ils passaient. Un autre mérite de ce grand écrivain, c’est la manière pittoresque et animée avec laquelle il représente les scènes dramatiques, les personnages qui y jouent un rôle, leur physionomie, leur costume, et les lieux où son imagination brillante transporte ses lecteurs.

La seule collection complète des œuvres de Walter Scott est celle publiée par Ch. Gosselin en 165 vol. in-12, 1820-32. — L’édition la plus exacte et la plus populaire des romans de cet auteur, est celle publiée par MM. Firmin Didot en 27 vol. in-8, à deux col., prix 50 fr.

LA DAME DU LAC, roman tiré du poëme de Walter Scott, traduit par Mme Élisabeth de Bon, 2 vol. in-12, 1813. — La Dame du Lac tient du poëme et du roman : du poëme, par l’élévation du style, la poésie des descriptions, les ornements fleuris du langage ; du roman, par les aventures, l’héroïne et la plupart des personnages. Le fond de l’ouvrage est une pure fiction ; mais les événements sont censés se passer en Écosse, sous le roi Jacques IV, qui est lui-même un des principaux personnages du roman. La proscription des Douglas, illustre famille d’Écosse, en est le principal sujet. Un des caractères le plus fortement tracés est celui du comte Roderic, auteur des infortunes de cette folle si touchante, qui ne paraît qu’un instant pour mourir, et sauver par sa mort un des plus aimables personnages du roman. Ce Roderic cependant n’est point un monstre, un scélérat ; s’il est fier, hautain, ambitieux, emporté, vindicatif, il ne manque point de générosité dans l’occasion. Il avait ordonné à toutes les gardes avancées de sa troupe, à toutes les sentinelles, de mettre à mort un étranger qui s’était introduit dans son île, et qu’il regardait comme un espion ; heureusement il montait la garde lui-même, et c’est