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plus de tristesse vraie. L’auteur s’y permet beaucoup de sorties philosophiques qu’il n’est pas permis de blâmer, car il a commis trop rarement depuis de ces péchés-là.

TRILBY, ou le Lutin d’Argail, nouvelle écossaise, in-12, 1822. — Quel est ce Trilby, qui, dans la chaumière du pêcheur Dougal, se plaît à côté de la cellule harmonieuse de Grillon, qui soupire près de la brune Jeannie filant au coin du feu ; qui, lorsqu’elle s’endort, s’approche doucement, effleure ses joues rosées, se roule dans les boucles de ses cheveux, se repose sur son sein ? C’est une âme revêtue d’un corps aérien, c’est le follet de la chaumière, c’est le lutin d’Argail. Dirai-je ses chastes amours ? Raconterai-je les soupirs innocents de son amie ? Parlerai-je du moine centenaire de Balva, prononçant les paroles d’un exorcisme irrémissible, exilant le pauvre lutin, et le condamnant à ne jamais revenir sous le toit où il a tenté la fidélité de la batelière ? Dirai-je les chagrins de Jeannie, veuve de son cher follet, les efforts de Trilby pour se rapprocher de la femme à qui son existence est attachée, ses transformations et ses apparitions, les douces terreurs et les désirs de son amante ? Non, j’aime mieux laisser le mélancolique romancier nous conter cette touchante histoire.

SOUVENIRS DE JEUNESSE, extraits des Mémoires de Maxime Odin, in-8, 1832. — Dans cet ouvrage, l’auteur présente un seul personnage qui, assis au coin d’un feu pétillant par une soirée d’hiver, en face d’une vieille baronne, sa grande amie, lui raconte sa vie avec quelques femmes. Il a exercé une triste influence sur ces belles âmes qui adoptèrent la sienne. Toutes s’éteignirent, toutes passèrent, lui seul resta. À chaque fin de chapitre, à chaque dernière page, il y a une mort qui vous désole, et puis un nouveau nom sur le feuillet suivant comme une sorte de résurrection, ou bien un autre anneau à cette chaîne de jeunes filles que la douleur, la faiblesse, la passion, ou un anévrisme, brisent de distance en distance. Ne croyez pas que Maxime Odin ignore un seul secret du cœur féminin ; dans toutes les classes il a cherché une amie, un ange, une main pour la sienne, une bouche pour sa bouche, et il semble que le sort jaloux ait voulu le punir d’avoir plu à ces êtres fragiles en les présentant devant ses yeux pour les lui ravir promptement, comme dans les lanternes magiques paraissent et disparaissent avec rapidité les figures peintes sur verre. Dans ce récit, palpitant d’intérêt, toute femme reconnaîtra sa pensée et sa vie. — Les Souvenirs de jeunesse se composent de quatre nouvelles bien distinctes : Séraphine est plutôt un souvenir d’enfance que de jeunesse ; c’est bien le premier amour qui s’ignore lui-même, et dont le souvenir suffit à rajeunir encore une âme usée et flétrie ; dans Clémentine s’annonce le jeune homme in-