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Cumberland, peints d’après ceux du comté de Kent, au milieu desquels il passait sa vie à Tunbridge, peuvent être placés à côté des portraits de ce genre faits par les plus grands maîtres. Le caractère d’Ézéchiel Daw est si heureux, que, quoique l’idée lui en ait été inspirée par le caractère d’Abraham Adam, dans Joseph Andrews de Fielding, il est encore un excellent original. L’intrigue est habilement nouée et diversifiée par une suite d’incidents liés par un genre de sentiment particulier à l’auteur. Contre l’usage reçu, c’est l’héroïne qui fait les avances, et Cumberland a, dans ce cas, poussé les choses très-loin : son héros est doué de la continence du patriarche hébreu, et il l’expose aux attaques d’un être séduisant, dont les aveux sont bien plus dangereux que ceux de la matrone égyptienne. On peut même faire encore un reproche à l’auteur : Henri se trouve avec Suzanne placé dans des situations telles, que les écrivains modernes n’oseraient pas se permettre de les présenter, parce qu’elles compromettent évidemment la décence.

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CUNINGHAM (Allan), poëte écossais.


MARGUERITE LINDSAY, traduit de l’anglais, 4 vol. in-12, 1825. — Cet ouvrage est le tableau le mieux tracé des mœurs de la classe laborieuse, dont Allan Cuningham lui-même est sorti. Simple tailleur de pierre, employé dans l’atelier de Chartrey, le plus célèbre sculpteur des Îles Britanniques, Allan Cuningham sentit naître au milieu de ses travaux grossiers, les inspirations du génie ; il s’y livra entièrement, et ses premières productions furent favorablement accueillies. Ses chansons avaient commencé à le faire connaître ; plusieurs poëmes établirent ensuite sa réputation littéraire, et les éloges que Walter-Scott donne à celui qui est intitulé Sir Marmaduke sont une preuve certaine du mérite de Marguerite Lindsay. Marguerite Lindsay est la femme d’un pauvre ouvrier imprimeur qui habite un des faubourgs d’Édimbourg. Le travail de Walter Lindsay suffit pour entretenir sa femme et ses enfants ; mais bientôt il néglige son travail et sa famille, et s’érige en réformateur religieux et politique. Prévenu de conspiration, il est arrêté et jeté dans une prison. De cette époque datent les malheurs de sa famille et les épreuves de Marguerite Lindsay ; privée des ressources que lui procurait le travail de son époux, elle abandonne, avec ses trois filles, l’humble hameau où s’étaient écoulés tant de jours paisibles. Nous ne la suivrons pas dans la retraite qu’elle avait choisie ; il serait trop long d’ailleurs de retracer toutes les vicissitudes de sa vie agitée. Après avoir survécu à toutes les personnes qui lui étaient chères, elle retrouve enfin le bonheur, après avoir