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promesses… Elle part pour un bal où elle espérait trouver le plaisir ; elle part déchirée de remords, et dans le tumulte de la fête elle cherche inutilement des yeux celui à qui elle voudrait demander le pardon de sa faute ; enfin, au désespoir de son absence, et n’en interprétant que trop bien le motif, seule, trempée de sueur par une de ces nuits glaciales dont l’âpreté du climat a redoublé le péril, elle s’échappe, traverse presque nue une longue cour pour aller chercher sa voiture, y monte, et ne rentre dans son palais et dans son lit que pour n’en plus sortir qu’au bruit du tintement funèbre de la cloche de Sainte-Croix et du couvent de la Visitation. Que faisait cependant le malheureux Edgard ? Renfermé pendant deux jours, en proie à sa douleur, il s’était interdit toute communication au dehors ; il avait déclaré qu’il ne voulait recevoir ni visites ni lettres. Cependant Ludwika employait à lui écrire les derniers efforts de son courage épuisé. La douleur de ne pas voir Edgard, de ne pas même recevoir de réponse, la pensée qu’elle a pu devenir pour lui un objet d’indifférence et de mépris, accélèrent le terme fatal ; et, lorsqu’au troisième jour, Edgard, triomphant enfin de son opiniâtreté, sort de sa prison volontaire, poursuivi par les plus noirs pressentiments, pour aller demander grâce à Ludwika, il aperçoit sous le vestibule du palais de son amante expirée, l’horrible réalité d’une vision qu’il avait eue précédemment. — Un intérêt soutenu et habilement gradué, une peinture vraie des mœurs de la société et du climat de la Pologne, tels sont les titres qui recommandent cette production remarquable.

ALOYS, ou le Religieux du mont Saint-Bernard, in-12, 1829. — C’est une peine d’amour qui fait le fond de ce roman. Aloys, doué d’une imagination vive et inquiète, d’une ardeur qui le pousse à tout et le retire de tout, est un de ces hommes dont l’esprit travaille beaucoup, mais sans but, sans intention, exalté et indifférent, et qui, pour comble de malheur, a le secret de son caractère, et n’a pas même la ressource d’être dupe de son imagination et de s’y abandonner sans défiance. Il arrive à la jeunesse sans changer de dispositions, se met à voyager, et, après avoir parcouru la Suisse, entre en Italie. C’est là que commence à se nouer l’intrigue du roman. Aloys rencontre Mme de M… et s’attache à elle. Est-ce amitié, est-ce amour ? il ne le sait pas. Mme de M…, qui trouve en lui les qualités qu’elle souhaite dans un gendre, lui destine sa fille : il n’ose pas refuser, et avant d’avoir pu se rendre compte de ses sentiments, il se trouve engagé par sa parole. Cependant le mariage s’approche ; alors il se passe dans l’âme d’Aloys une lutte terrible. Il sent que c’est Mme de M… qu’il aime. Épousera-t-il sa fille ? Et s’il ne l’épouse pas, après avoir promis, que dira le monde ? Enfin, il écrit une lettre à Mme de M… où il avoue tout,