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tambour et la flûte. Et après le tourner, on lit le Coran et le Mesnévi et ensuite des prières en turc.

— La musique que j’entendrai fut-elle composée ou tout au moins choisie par Djelal-eddin ?

— Elle nous vient de bouche en bouche par tradition.

— Les poèmes que l’on dit pendant le tourner et que vous attribuez à Djelal-eddin sont sûrement de lui ?

— Il avait l’habitude de porter avec lui une flûte de roseau et un petit tambour. En tournant, il disait des vers ; ses musiciens les transcrivaient, les mettaient en musique et, au plus prochain concert, les chantaient.

— Je vous demande que vous ne vous lassiez pas de m’expliquer le développement de la cérémonie.

— Au commencement, vous verrez quelques promenades et la musique s’élèvera. C’est pour préparer à l’exercice de la danse. Tous s’agenouilleront et frapperont de leurs mains sur le plancher, puis ils se lèveront, signifiant ainsi des hommes qui meurent pour ressusciter. Et alors ils commenceront à marcher en processionnant autour de la salle de danse… Pendant cette promenade, la musique joue, et cela signifie qu’après avoir ressuscité ils marchent vers Dieu. Leurs trois tours achevés, ils sont devant Dieu… Le Tchélébi tient la place de Dieu. Non qu’il soit la personne de Dieu, mais il est son représentant. Il n’a pas les forces de Dieu, mais il a la force d’accomplir les ordres de la divinité. En cette qualité, j’autoriserai à danser… La première danse, alors, c’est la science ; la seconde danse, c’est de voir avec les yeux ; la troisième danse, c’est la période de l’entière connaissance… À ce troisième degré, les danseurs sont inspirés, ils sentent tout ce qu’ils doivent sentir ; c’est la fin de leur désir, c’est une extrême puissance que je ne puis exprimer. Ils dansent, sans savoir ce qu’ils font.

— Je trouve ces explications bien intéressantes, et je remercie M. le Supérieur ; mais ne sont-elles pas un peu abstraites ? Je voudrais avoir dans les mains le livret de l’opéra que je vais voir danser. Puis-je tenir dans mes mains les textes ?

— Il y a un ou deux exemplaires liturgiques dans chaque tekké. Le choix des textes a été fait par les successeurs de Djelal-eddin.

— Il ne me suffirait pas d’avoir les textes. J’en voudrais