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en apprécierez le joli ton oriental et puis ce bel amour de la France que nos missionnaires enseignent aux enfants. Je n’y change pas une virgule.


« Monsieur le Député.

« Il y a quelques semaines à peine, nous étions réunis en ce lieu pour présenter nos salutations à Son Excellence l’Ambassadeur de France à Constantinople.

« Et voilà qu’aujourd’hui votre honorable visite nous permet de manifester à nouveau nos sentiments patriotiques. « Nos maîtres nous ont dit que vous comptiez au rang de ces hommes distingués qui, par leurs œuvres impérissables, méritent le titre d’immortels. Aussi nous aurions quelque hésitation, nous étrangers, à parler en votre présence une langue au sujet de laquelle les Académiciens sont journellement nos ennemis, si nous ne savions que la première qualité du parler de France est qu’il laisse dire le cœur. C’est cette voix que vos oreilles exercées entendront monter du tréfonds de nos âmes.

« Dans un cadre quelque peu agreste, sur ce plateau d’Anatolie où le soleil d’Orient semble, depuis des siècles, avoir anémié les forces de la nature autant que les vigueurs morales, il est un coin modeste, à l’ombre d’un clocher, qui nous paraît une petite France. Nous y venons tous les jours respirer une atmosphère française ; et c’est pourquoi, si vous percevez les battements de nos cœurs, si vous pouvez surprendre la chanson qui les berce et le rêve de nos esprits, vous aurez l’illusion de vous trouver dans votre propre pays.

« Nous savons que la France est grande, que la France est puissante, que la France est riche de tous les biens ; nous savons qu’elle est le centre de la civilisation, le foyer de la science ; qu’à son école l’on apprend la distinction, le bon goût, la noblesse des sentiments ; que, chez elle, bravoure et vaillance sont choses communes ; et c’est pourquoi nous l’aimons à l’égal de notre propre patrie.

« Nous vous prions, monsieur le député, de vouloir bien dire tout cela aux petits Français de France ; nous voulons être leurs frères.

« C’est au nom de tous les élèves du Collège français Saint-Paul que je le dis et que je crie :

« Vive la France ! »