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s’abime en même temps que la côte, le frémissement se transmet à toute la masse liquide et le rivage est submergé par des lames de fond dont l’incalculable violence emporte tous les obstacles, digues ou maisons, comme des fétus de paille, et projette des navires à l’ancre jusqu’à plusieurs centaines de mètres dans l’intérieur des terres ; la poussée se transmet à travers l’Océan jusqu’aux bords asiatiques où elle cause des désastres presque aussi terribles.

Une autre cause donne à Valparaiso le caractère de ville nouvelle, c’est l’augmentation constante de la population, qui a triplé depuis quarante ans, et qui s’élève maintenant à 250 000 habitants. Le fait d’être au premier rang pour braver les dangers de la guerre étrangère et des tremblements de terre, avec toutes leurs conséquences, n’arrête donc pas le développement de ce centre. C’est le port de Santiago, la capitale du Chili, et le débouché le plus important de la République. Les nécessités des transports modernes obligent les autres ports à transborder ici la plus grande partie de leur fret et Valparaiso est le centre d’un important cabotage.

Resserré entre les Andes et le Pacifique, le Chili s’allonge de la frontière du Pérou au cap Horn, sur 18° de latitude, —» 2 000 kilomètres, — et sa largeur est en moyenne de 150 kilomètres, sans jamais dépasser 200 kilomètres ; c’est donc un pays essentiellement marin.

A huit heures, le Jules-Michelet arbore ses couleurs et salue la terre des 21 coups de canon réglementaires. Après les formalités d’usage, le Ministre de France, M. Lefeuvre-MéauIIe, monte à bord avec son attaché militaire et quelques membres de la colonie française, où je retrouve avec joie plusieurs anciens combattants, dont un de mes compagnons d’armes de Verdun. Bientôt arrive le vice-amiral don Francisco Nef, commandant l’Ecole navale chilienne, et le contre-amiral don Augustin Fontaine, tous deux d’origine française ; l’amiral Nef a été condisciple de l’amiral Pugliesi-Conti, et les deux camarades J’École se retrouvent avec une joie réciproque.

Nous débarquons. Sur le quai, les autorités civiles, navales et militaires nous attendent, que me présente l’Intendant de la province, don Alberto Phillips. Le régiment de Maïpo rend les honneurs. Je passe devant cette belle troupe, qui se présenta très bien, quoique les hommes n’aient que trois mois de service.