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la force même de l’expérience, tout ce qu’il y avait là pour eux d’hygiène, de santé, de douceur de vivre.

Et pourtant l’an passé, nous avons vu que l’heure d’été n’a été maintenue que par une sorte de faveur, de condescendance de la Chambre. Et pourtant cette année-ci nous voyons que celle-ci vient de se mettre en vacances sans avoir accepté, malgré les objurgations du ministre des Travaux publics, de discuter la réforme.

Comment cela est-il possible ? Quelle est la raison d’un tel état de choses. Je crois qu’il n’est pas malaisé de la découvrir. Il y a à la Chambre une majorité de députés ruraux, majorité consciente de sa force, et qui n’entend éviter aucune occasion de la faire sentir. Or, nous l’avons dit, l’avance de l’heure n’intéresse pas, ne peut pas intéresser les campagnes, la vie agricole étant aujourd’hui, comme elle l’a toujours été, réglée par les circonstances atmosphériques locales et par la marche réelle du soleil.

Il est vrai que, par ailleurs, certains petits inconvénients se sont manifestés dans certaines campagnes lors de l’application de l’heure d’été les années précédentes. Les heures légales d’ouverture et de fermeture des écoles étant, notamment, restées les mêmes, il est arrivé que par endroits les enfants devaient se lever trop tôt pour aller en classe.

Cet inconvénient et les analogues ont été supprimés par la mesure adoptée l’an passé et qui était incorporée au projet tombé dans l’eau cette année, et selon laquelle les autorités locales ont, à la demande des municipalités, la faculté de modifier les heures des écoles et celles des chemins de fer d’intérêt local.

On a d’ailleurs une statistique bien suggestive concernant l’usage que les municipalités ont fait l’an passé de cette faculté : statistique dont j’emprunte les éléments essentiels à M. F. Honoré :

Sur 40 000 communes environ dont se compose la France, des dérogations ont été demandées par 15 031 communes, soit par 39 pour 100. On peut donc dire que les deux tiers des communes se sont accommodées du régime de l’heure d’été sans éprouver le besoin d’y apporter aucune modification. Et ces deux tiers, qui comprennent toutes les villes, c’est-à-dire toutes les communes les plus peuplées, représentent beaucoup plus que les deux tiers de la population française.

D’autre part, sur les 15 031 communes ayant demandé des dérogations, 1 323 appartiennent aux départements de la zone la plus orientale de la France (Meurthe-et-Moselle, Vosges, Haute-Saône, Doubs,