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sauvé par des forces divines, il retombait dans les changeantes et vulgaires combinaisons humaines et la cause de ses mystérieuses hésitations était que, en secret, à l’insu de la Pucelle, il venait de traiter avec le duc de Bourgogne.

Avec l’échec devant Paris, le martyre de Jeanne était commencé ; deux ans plus tard, il se terminait sur le bûcher de Rouen.

Mais l’œuvre de la Providence s’accomplit sans les hommes, malgré eux bien souvent, et leur aveugle prudence s’oppose en vain aux lumineuses audaces de la foi. Morte, Jeanne, malgré l’ingratitude du Roi, combattait toujours pour lui ; l’Anglais continuait de la craindre ; elle planait au-dessus des armées, commandait toujours la victoire, et, cinq ans après son martyre, c’est bien elle encore qui fit entrer Charles dans Paris.

Le 12 novembre 1437, c’est devant cette église de la Chapelle où Jeanne avait, en priant, préparé la délivrance que furent apportées au Roi les clefs de la ville.

Cette petite église, vieille déjà d’au moins deux siècles au temps de Jeanne, a subi depuis d’importantes modifications : le XVIIIe siècle a remplacé son portail par une façade au goût du jour ; le XIXe, pour l’agrandir, en a reculé le chœur. Mais, dans ces remaniements successifs, les vieux piliers romans de la nef, ceux qui virent prier Jeanne d’Arc, sont heureusement restés debout. Conservés dans la basilique avec un pieux respect, ils demeureront toujours, témoins sacrés des miraculeux événements qui firent de Jeanne la grande sainte de la Patrie.


Ch. GAILLY DE TAURINES.