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JEANNE D’ARC
A SAINT-DENYS DE LA CHAPELLE

Au dernier congrès diocésain de Paris, a été annoncée, de façon discrète encore, une nouvelle qui, bientôt sans doute hautement proclamée, fera battre d’une joyeuse et fière émotion le cœur de tous les Français. Le nom de Jeanne d’Arc va être donné à l’une des églises de Paris, celle de Saint-Denys de la Chapelle.

Les souvenirs historiques qui ont désigné pour un tel honneur une église jusqu’ici si modeste et construite, il y a des siècles, pour desservir, au milieu des champs et des vignes, un petit village suburbain, semblent intéressants à exposer ici.


I. — JEANNE A SAINT-DENYS

L’année 1429 vit se dérouler en France de si miraculeux événements que la chrétienté tout entière en fut soulevée d’une merveilleuse admiration.

En février, le pauvre petit roi Charles VII, déshérité, fugitif, errant, se trouvait dans une situation quasi désespérée : relégué au delà de la Loire, on le nommait en riant : « le roi de Bourges. » Roi de Bourges !... pourrait-il même le demeurer longtemps encore ? L’Anglais menaçait Orléans ; cette ville une fois enlevée et la ligne de la Loire forcée, le malheureux prince était sans asile. Déjà même, en prévision de ce désastre, il songeait à fuir en Espagne ou en Ecosse.

Or, en mars, un bruit étrange commença à courir : une gardeuse de brebis aux confins de Lorraine, amenée devant Charles VII, affirmait qu’elle délivrerait Orléans et ferait sacrer le Roi à Reims. Une gardeuse de brebis, quelle dérision !