Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 14.djvu/843

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

visite du prince co-régent de Saxe, qui a pour femme une sœur de l’archiduchesse Sophie ; toutes les deux sont également de haute taille.

L’autre jour, après l’arrivée de M. de Milanges, je reçus une lettre de M. de Caraffa m’annonçant son départ pour Kônigswart et le désir de me faire une communication dès son retour. Le surlendemain, comme il m’en priait, je me rendis à Prague pour le joindre. Il me donna connaissance d’une longue et confidentielle dépêche du prince de Cassaro. Voici en substance ce qui est dit dans cette pièce.

Au moment où elle débarquait à Palerme, le roi de Naples écrivit à la Duchesse de Berry, lui disant que Charles X voulait avoir des notions précises sur sa situation. Elle répondit qu’elle allait partir de Palerme pour Naples, afin de donner à son frère tous les renseignements voulus. De là, elle comptait se rendre à Prague où elle était fort pressée de revoir ses enfants et où elle fournirait à Charles X les explications nécessaires. Le roi de Naples lui écrivit alors qu’elle ne devait pas faire ce voyage sans l’autorisation de Charles X ; par respect, elle ne devait rien décider contre ses intentions, or il ne les avait pas encore manifestées, elle devait donc attendre de les connaître. La Duchesse se rendit à ces raisons et il fut décidé qu’au moyen de lettres dont M. de Milanges serait porteur, Madame ferait demander à Prague la permission de se mettre en route. Mais, tout à coup, survint M. de Choulot, qui insista fortement auprès du roi de Naples pour qu’il s’employât sans retard à obtenir une autorisation qui importait à l’honneur de la Duchesse de Berry.

L’aspect des choses se modifia aussitôt et le prince de Cassaro, porte-parole de son maitre, le roi de Naples, s’exprime à peu près en ces termes dans sa dépêche à M. de Caraffa : Que répondre à la Duchesse de Berry qui veut revoir ses enfants ? Peut-on s’y opposer, peut-on encourir le reproche de continuer en Sicile la détention de Blaye en s’opposant au désir d’une mère ? Peut-on en quelque sorte contribuer à des mesures dont la rigueur déshonorerait la Duchesse de Berry, si, ce que nous prévoyons avec crainte, cette princesse venait à s’enfuir ? Quel embarras ne créerait-elle pas alors au roi de Naples dont elle s’éloignerait comme d’un persécuteur, à l’Empereur dont elle franchirait les frontières malgré lui, à Charles X chez lequel