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LE DRAME IRLANDAIS

III [1]
L’ULTIME ÉPREUVE

Cosas de Irlanda !... Qui comprendra jamais les choses d’Irlande ? C’est toujours en Erin l’imprévu qui arrive, l’invraisemblable qui se vérifie ; il pèse sur l’Ile Verte une malédiction qui fait que rien ne peut lui réussir, et tels sont les caprices de son destin que l’observation en reste sans cesse déconcertée. Voilà ce qu’on entend dire, depuis deux ans surtout que se déroule sous nos yeux le dernier acte du drame irlandais. Oserons-nous prétendre que, si incompréhensibles que paraissent à première vue les événements, il est à croire qu’ils ont en Irlande comme ailleurs leur logique, et qu’ils s’enchaînent tout de même avec une rigueur quasi fatale, assez claire après tout pour qui veut se donner la peine de discerner les facteurs essentiels de leur jeu ?

Nous avons dit comment l’Irlande, ayant rejeté les voies de droit, s’est donnée à l’Extrémisme, nous avons vu l’Extrémisme s’exalter dans la lutte contre l’Angleterre. Au mois de juin 1921, il semble triompher. Après deux ans de guerre, l’Irlande se voit offrir la paix par le Gouvernement britannique, et, avec la paix, l’autonomie au sein de l’Empire : ce n’est pas tout son idéal, ce n’est pas l’indépendance pleine et entière, c’est du moins tout le possible, toute la substance réelle de la liberté. Mais voici le retour fatal et brutal des choses. Comblée à la fois

  1. Voyez la Revue des 15 septembre et 1er octobre 1921.