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de s’empêcher de réfléchir entre le ciel et l’eau, de chercher à mettre un peu d’ordre dans ses impressions, et même de conclure, en traçant toutefois quelques points d’interrogation.

Il me semble que le Pérou manque avant tout de voies de communication. Si le plan tracé dès 1870 était achevé, un chemin de fer transaméricain irait de l’Equateur au Chili entre les deux Cordillères, en utilisant les deux importants tronçons Cerro de Pasco-Oroya-Jauja-Huancayo, d’une part, Cuzco-Juliaca-Puno, d’autre part, qui forment près de la moitié du transaméricain. Aux deux transandins : Callao-Lima-Oroya et Mollendo-Aréquipa-Puno, un troisième s’ajouterait vers le Nord, puis deux ou trois voies reliant la ligne centrale avec le réseau fluvial de l’Amazone. A ce moment, les tarifs de transport diminueront, parce que l’augmentation très importante du fret diminuera les frais généraux. Les céréales de la Sierra, les bois de la Montana, remplaceront sur la côte les denrées et les matériaux qui y arrivent actuellement par mer. Des Andes et do la côte viendront le charbon et le pétrole, en même temps que tous les métaux précieux ou utiles. Les produits des tropiques afflueront par la mise en valeur de l’Amazone, qui est une tâche essentiellement militaire. Il est permis de prévoir pour ce pays un admirable essor.

En janvier 1920, il s’est donné une constitution qui contient en germe tous les progrès sociaux et économiques. Le texte proposé par M. Mariano Cornejo, actuellement ministre du Pérou à Paris et alors président de l’Assemblée Nationale, ne décide pas seulement des formes constitutionnelles ; il indique les garanties de chaque corps de l’État et de chaque citoyen ; il amorce un système financier qui cesse d’être établi uniquement sur les droits à l’entrée et à la sortie ; il prévoit l’instruction primaire obligatoire. La stabilité dans les institutions libérales paraît dès maintenant acquise au Pérou, qui a tant souffert autrefois de ses révolutions périodiques, Il semble bien que le développement des principes inscrits dans la Constitution de 1920 assurera définitivement cette stabilité, assoiera le crédit public nécessaire aux grandes entreprises et permettra tous les progrès.


Général MANGIN.