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que vous avez vu de près les régions torrides du Tonkin et du Soudan. Vous n’aurez pas vu, sans doute, comme dans ces latitudes, une mer intérieure qui s’étend à 4 000 mètres d’altitude et des chaînes de montagnes gigantesques qui forment le panorama le plus imposant de la création. Nous, sommes flattés de cette idée que ce cadre magnifique a été digne de votre personne et que pour la première fois vous êtes arrivé près des nids des condors, où l’esprit acquiert des lucidités transparentes et où les cœurs accélèrent leurs palpitations. A défaut d’autre hommage de plus de valeur, acceptez, monsieur l’ambassadeur, celui que vous offre la nature de nos plus hauts plateaux andins où vibrent les grandes sympathies de tout un peuple pour votre patrie glorieuse et pour les idéals qu’elle a défendus dans les lettres et sur les champs de bataille : le Droit et la Justice.

« Profondément reconnaissants de l’honneur de votre visite, nous avons voulu nous réunir un moment pour rendre notre hommage aux gloires de la France et aux généreux idéals qu’elle défend, tant par la propagande de ses grands penseurs que par les sentiments de son peuple, qui, aux heures d’épreuve, supprima les limites de l’abnégation humaine.

« Messieurs, je bois en l’honneur de Son Excellence le Président de la République française représenté en ce moment par l’illustre général Mangin et en l’honneur de la prospérité et de la grandeur de la France. »

J’ai répondu :


« Monsieur le Président de la République.

« C’est pour moi une joie en même temps qu’un honneur d’apporter le salut de la France au Gouvernement et au peuple boliviens. En aucune région du monde, la nature n’offre à l’homme un spectacle plus imposant et plus grandiose. A de pareilles altitudes, le cœur bat plus vite et la vision est plus claire, ainsi que Votre Excellence vient de le remarquer ; il est donc naturel que la Bolivie ait été la première, parmi les libres Républiques de l’Amérique méridionale, à rompre la neutralité et, dans une heure solennelle, à se ranger avec les défenseurs de la civilisation menacée. Déjà ses enfants, n’écoutant que la générosité de leur cœur, avaient versé leur sang dans les rangs français, et j’ai eu la joie de serrer la main à plusieurs de mes compagnons d’armes. Dans la chaleur de la lutte, tous