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choses à régler, et le matériel de votre vie éclipsera momentanément les exigences de vos affections. Si vous ne pouvez satisfaire au désir que j’ai de vous voir promptement, au moins, caro, rendez-vous à ma prière réitérée de me donner du 15 mai au 15 juin. Si vous étiez un gastronome, je n’insisterais pas, parce que, en province, ce mois est peu favorable ; mais vous vous prêtez avec si bonne grâce à nos habitudes simples, que j’ai confiance en la réussite de mon vif désir de vous avoir pour témoin du retour à la vie de mon petit éden. Vous y aurez une chambre toute prête, complète ; le parloir sera aussi définitivement arrangé, ainsi que le billard, sauf les papiers qui resteront encore, faute d’argent pour les remplacer. Je vous demanderai grâce pour le reste. Venez donc, Honoré. Cette mort m’a apporté mille douleurs ; outre celle d’un lien rompu, il y a eu des détails rebutants. Il me faut quelques jours de contact avec de belles âmes pour me remettre. C’est donc à une œuvre d’affection que je vous convie ; je vous en serai profondément reconnaissante.

Puisque vous avez pu quitter Paris, c’est que vos affaires vont bien ; tant mieux, mon cher ami, puissent tous les frottements disparaître de votre vie ! Je vais voir, aussitôt arrivée chez moi, à me procurer vos derniers ouvrages. Quand je vous lis, il me semble que cette communication n’est que pour moi, et j’en jouis comme de pensées émises pour moi toute seule ; et l’habitude de voir vos livres sur mes tablettes n’a point détruit cette bonne illusion. Ce sera donc une nouvelle participation de votre être moral, qui va me donner des joies dont j’ai vraiment bien besoin pour me remettre un peu en équilibre.

Adieu, bien cher, que 1834 vous sourie et vous apporte tons les plaisirs dont vous êtes le plus avide ! Mon amitié ne peut rien vous promettre de plus qu’elle ne vous a donné l’année précédente, mais aussi elle ne vous offrira jamais moins.

Je vous suis toute acquise, mon cher ami.

ZULMA.


Le 23 janvier 1834, Mme Carraud, de retour à la Poudrerie, lui écrit de nouveau :

Nous avons eu bien peur, mon cher Honoré : Mme Grand-Besançon a faut une fausse-couche, accompagnée de circonstances si gradvs que nous avons craint de la perdre. C’est vous