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POÉSIES

LA GUIRLANDE MARINE

HOMO DUPLEX


I


Je gagne vers midi le haut du promontoire
Où, caché par les pins, verdoyante prison,
Comme un faune rieur que grise la saison,
J’écrase entre mes dents la figue obèse et noire.

Puis je regarde au loin, plissant sa souple moire,
La rondeur de la mer emplir tout l’horizon,
Et dans mes sens, repris par l’antique frisson,
L’urne d’or du soleil verse sa chaude gloire.

Je suis aux premiers jours de la terre : j’entends
La danse des sylvains, sous les myrtes flottants ;
La volupté gémit, une flûte se pâme :

Puis des sistres aigus font résonner les bois,
Aphrodite surgit de l’écume, et je vois
Sa chair, rosier de feu, qui fait flamber mon âme.

II


Mais lorsque le croissant se courbe dans le ciel,
Lorsque l’Angélus tinte, et meurt et se prolonge,
Cette fête insolente obscurcit son mensonge :
Lentement la syrinx assourdit son appel.