Aux premiers bruits de guerre qui circulent en Europe, après l’ultimatum de l’Autriche à la Serbie, M. Spindler se refuse, comme tant d’autres, à croire la catastrophe inévitable.
Dimanche, 25 juillet 1914. — Au sortir de la messe, ce matin, je vais comme d’habitude à la poste prendre mon courrier. J’y rencontre Laugel. Très agité, il m’interpelle : « Eh bien ! qu’est-ce que vous en dites ? — Et de quoi ?— Mais de la guerre, parbleu ! car nous allons avoir la guerre. — Et pourquoi ? — Mais vous ne lisez donc pas les journaux ? Il y a que la Russie s’oppose à ce que l’Autriche envahisse la Serbie ! — Ça s’arrangera ! » Il me tourne le dos en haussant les épaules.
Mon beau-frère Auguste qui vient me rejoindre, ne croit pas non plus à la guerre. Lui et les siens sont arrivés la veille de Paris, tout heureux à l’idée de passer de bonnes vacances en Alsace.
Cinq jours plus tard, M. Spindler se rend à Strasbourg où déjà l’on respire une atmosphère de guerre. Là un fonctionnaire allemand lui déclare que l’événement est « sûr et certain. »
Jeudi, 30 juillet. — Je suis forcé d’aller à Strasbourg à cause
d’un concours de bijoux et de petits objets que la Ville a organisé
pour éliminer la bimbeloterie de mauvais goût qu’on offre actuellement
aux touristes comme souvenirs d’Alsace.