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À Baalbek, j’aurais voulu avoir le mince livret des hymnes que Racine dédie à l’aube bienfaisante, au soleil chrétien que l’on peut regarder en face. Qu’elles sont délicieuses, ces Ambrosiennes, devenues pour nous les Raciniennes, et ces mots latins décalqués par le plus beau génie français : Ales diei nuncius !…


L’oiseau vigilant nous réveille,
Et ses chants redoublés semblent chasser la nuit ;
Jésus se fait entendre à l’âme qui sommeille
Et l’appelle à la vie, où son jour nous conduit.
« Quittez, dit-il, la couche oisive,
Où vous ensevelit une molle langueur :
Sobres, chastes et purs, l’œil et l’âme attentive,
Veillez ; je suis tout proche, et frappe à votre cœur. »
O Christ ! O soleil de justice.
………….


Ou bien encore : Nox, et tenebrae, et nubila.


Sombre nuit, aveugles ténèbres,
Fuyez : le jour s’approche, et l’Olympe blanchit ;
Et vous, Démons, rentrez dans vos prisons funèbres :
De votre empire affreux, un Dieu nous affranchit.
Le Soleil perce l’ombre obscure,
Et les traits éclatants qu’il lance dans les airs,
Rompant le voile épa !s qui couvrait la nature,
Redonnent la couleur et l’âme à l’univers.
O Christ, notre unique lumière !
…………


Et encore : Aurora jam spargit polum


L’Aurore brillante et vermeille
Prépare le chemin au Soleil qui la suit ;
Tout rit aux premiers traits du jour qui se réveille :
Retirez-vous, Démons, qui volez dans la nuit.
Fuyez, songes, troupe menteuse,
Dangereux ennemis par la nuit enfantés.
Et que fuie avec vous la mémoire honteuse
Des objets qu’à nos sens vous avez présentés.
Chantons l’Auteur de la lumière !…
…………